Mettre le monde sur la voie d’un développement durablement équitable et écologique. C’est avec cette ambition que la communauté internationale a signé en septembre 2015 un plan commun – l’Agenda 2030 avec ses 17 objectifs de développement durable. Cet agenda vise à établir d’ici à 2030 un monde écologiquement et socialement durable, vivant en paix, dans la stabilité, la sécurité et la prospérité.
La Suisse a contribué de manière déterminante au succès des négociations. En tant que petit pays fortement intégré sur le plan mondial, la Suisse a un grand intérêt à un environnement global stable et durable. Un monde vivant dans la prospérité et en paix ne correspond pas seulement à notre tradition humanitaire, mais est également dans l’intérêt des entreprises suisses actives sur les marchés internationaux. Malgré cela, des signes se multiplient semblant indiquer que les hautes sphères de l’administration fédérale ne souhaitent pas accorder à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 le poids politique qu’elle devrait avoir.
En juillet de cette année, la Suisse présentera à New-York lors du Forum politique de haut niveau (High-Level Political Forum, HLPF) à l’ONU les progrès qu’elle a réalisés en lien avec l’Agenda 2030. Le Conseil fédéral doit d’ici-là décider qui, au sein de l’administration fédérale, doit endosser la responsabilité globale pour la mise en œuvre de l’Agenda 2030 dans la politique intérieure et extérieure de la Suisse. Un ancrage de haut niveau – par exemple via un délégué directement subordonné au Conseil fédéral – permettrait à la Suisse de donner un signal fort qu’elle entend jouer un rôle de premier plan au niveau international en termes de développement durable.
D’autres pays ont pris les devants en donnant l’exemple. Ils ont attribué la compétence pour l’Agenda 2030 à la chancellerie, à un ministre ou à un délégué du gouvernement – une position donc directement liée au gouvernement, à même de demander des comptes à l’ensemble des offices des différents ministères concernés. Cela est important au vu du fait que l’Agenda 2030 concerne l’ensemble des domaines politiques d’un pays et que sa mise en œuvre exige une démarche coordonnée par-delà l’ensemble des offices.
Un désaccord règne par contre au sein de l’administration fédérale sur la question de savoir qu’elle instance doit prendre la responsabilité de l’Agenda 2030. L’idée qu’une instance supérieure de coordination leur soit mise sous le nez énerve considérablement les hauts fonctionnaires de certains offices. Le danger existe dès lors que les décisions stratégiques en lien avec l’Agenda 2030 soient attribuées à une conférence des directrices et directeurs des offices. Un groupe de travail mixte des différents départements serait chargé des tâches pratiques de coordination.
Par le biais d’un tel « compromis bien suisse », tous les offices fédéraux seraient un peu compétents pour l’Agenda 2030, mais personne n’en endosserait vraiment la responsabilité. Il manquerait un interlocuteur clairement défini aux cantons, aux organisations de la société civile et à toutes les entreprises qui souhaitent s’associer étroitement à la mise en œuvre de l’Agenda 2030. Ces parties prenantes souhaitent pour l’Agenda 2030 un ancrage de haut niveau, doté de compétences claires. Il ne reste que peu de temps au Conseil fédéral pour trouver une solution raisonnable.
Mark Herkenrath, Directeur d’Alliance Sud