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Medienmitteilung
La Suisse doit cesser son blocage sur les brevets
25.11.2021, Commerce et investissements
La conférence ministérielle de l’OMC, qui se tiendra à Genève du 30 novembre au 3 décembre, va discuter de la dérogation temporaire à la protection de la propriété intellectuelle sur les vaccins, tests et médicaments anti-covid. La Suisse doit cesser son blocage systématique à l’OMC, qui dure depuis plus d’un an. De leur côté, les firmes pharmaceutiques doivent partager sans restriction leurs savoir-faire.
© Tim Reckmann / pixelio.de
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OMC : La Suisse peut souffler…. pour l’instant
29.11.2021, Commerce et investissements
La conférence ministérielle de l’OMC est ajournée sine die. La Suisse et l’UE sont de plus en plus isolées dans leur opposition à la levée des brevets sur les vaccins. Sans attendre la prochaine ministérielle, une décision peut et doit être prise.
Siège de l’OMC à Genève
© Isolda Agazzi
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Medienmitteilung
Une nouvelle stratégie sans base légale
01.02.2022, Commerce et investissements
La Commission de politique extérieure du Conseil national (CPE-N) a tenu hier une consultation sur la nouvelle stratégie économique extérieure de la Suisse. Si Public Eye et Alliance Sud saluent cette démarche, elles regrettent le manque de base légale de cette stratégie. La Suisse doit se doter d’une loi efficace sur le commerce extérieur afin de donner une assise solide à ce domaine politique très important pour les droits humains et l’environnement.
© Parlamentsdienste 3003 Bern
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Commerce et climat : vrais efforts ?
29.09.2023, Commerce et investissements
Depuis l’élection de Lula à la présidence du Brésil, l’accord de libre-échange de l’AELE avec le Mercosur pourrait être de nouveau sur les rails, mais les garanties sur le climat risquent d’être du greenwashing.
Un bûcheron non loin de terres indigènes dans la forêt amazonienne de l’Etat de Rondônia, au Brésil.
© Lynsey Addario/Getty Images
Après quatre ans d’assoupissement, l’accord entre les pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE), dont la Suisse est membre, et le Mercosur pourrait redevenir d’actualité. Conclu dans la substance en août 2019, mais pas signé, ni publié, ni ratifié – officiellement en raison d’un contrôle juridique qui s’éternise et de la pandémie qui a empêché les réunions en présentiel − il pourrait avoir été relancé par la visite du Conseiller fédéral Guy Parmelin au Brésil, début juillet. C’est que les conditions sur place ont changé : si les pays de l’AELE pouvaient difficilement négocier avec un climatosceptique comme Jair Bolsonaro, l’élection de Inácio Lula Da Silva à la présidence du Brésil rend la chose plus présentable. Sur les ondes de la Radio suisse romande, le ministre suisse de l’économie s’est montré optimiste : « Les signaux sont extrêmement encourageants. La déforestation a baissé d’un tiers l’année passée. Non seulement Lula s’est engagé à la stopper, mais il veut aussi prendre des mesures pour renouveler la forêt amazonienne », a-t-il déclaré.
Pour l’instant, les négociateurs sont en train de mettre à jour le chapitre sur le développement durable pour l’aligner sur celui de l’Union européenne (UE), plus ambitieux. Celle-ci mène des négociations en parallèle avec le Mercosur, conclues aussi dans la substance en 2019, après vingt années laborieuses.
Règlement européen sur la déforestation
Le 30 juin, une semaine avant la visite de Guy Parmelin en Amérique latine, un nouveau règlement est entré en vigueur dans l’UE, qui interdit carrément l’importation de produits contribuant grandement à la déforestation – bétail, cacao, café, huile de palme, soja, bois, caoutchouc, charbon et produits en papier. Les importateurs devront prouver que les terres n’ont pas été déboisées après le 1er janvier 2021, les pays de production étant classés en trois catégories qui entraînent un devoir de vigilance plus ou moins poussé, allant jusqu’à l’utilisation de drones et images satellite.
Cette avancée permettra-t-elle à l’accord européen d’être acceptable du point de vue climatique ? « Non », répond sans hésitation Pierre-Jean Sol Brasier de l’ONG bruxelloise Fern, qui a publié un document exhaustif sur le sujet et une lettre ouverte avec 50 autres ONG. Celles-ci critiquent le fait que le nouveau règlement ne prend en compte que les forêts (dans le cas du Mercosur, l’Amazonie), mais pas les autres écosystèmes comme les savanes du Cerrado, où la culture du soja a déjà entraîné la disparition de la moitié de la végétation, et du Chaco, ce qui ne va faire que déplacer le problème ; qu’il ne couvre pas des produits sensibles comme le sucre, le bioéthanol, le maïs et le poulet, ce qui risque d’encourager la production de bioéthanol et de canne à sucre ; et qu’il ne comprend pas les services financiers, à savoir les banques et les assurances qui financent la déforestation. Il y a aussi un risque que les pays trouvent un accord politique qui affaiblira le système de catégorisation du nouveau règlement. « Les négociations en cours avec le Mercosur risquent d’affaiblir le nouveau règlement sur la déforestation, qui constitue par ailleurs un pas en avant très important, malgré ses limites » regrette Pierre-Jean Sol Brasier.
Mais Lula ne veut-il pas stopper la déforestation et reboiser l’Amazonie ? « Il essaye de toutes ses forces », constate le militant, « mais il n’a malheureusement pas la majorité au Congrès, particulièrement à la chambre des députés où le Bolsonarisme est encore très puissant. Celle-ci est en train d’enchainer les attaques législatives contre les peuples autochtones et les forêts, avec des conséquences potentiellement dévastatrices ».
Un non-sens climatique
Quant à l’accord de libre-échange AELE – Mercosur, il risque aussi d’être un non-sens climatique. Même si le texte ne sera connu qu’au moment de la signature, l’organisation GRAIN estime qu’il entraînerait une augmentation de 15 % des émissions de gaz à effet de serre pour le commerce agricole à lui tout seul. Ce calcul tient compte du commerce des dix produits ayant le plus d'impact sur le climat – bœuf, agneau et volaille, maïs, soja, blé dur, huile d'olive et lait en poudre – importés dans les pays de l'AELE, ainsi que des exportations de fromage de la Suisse et de la Norvège vers les pays du Mercosur.
Rien d’étonnant lorsqu’on sait qu’un quart des émissions de CO2 est dû au commerce international de biens et services, selon la Banque mondiale. Si les Etats ont fourni des efforts pour y remédier, l'OMC estime que seuls 64 des 349 accords commerciaux régionaux notifiés contiennent des dispositions relatives au climat et qu’elles sont relativement moins nombreuses et détaillés que d'autres thèmes environnementaux, tels que la biodiversité. Le type de disposition le plus courant identifie l'atténuation et l'adaptation au changement climatique comme un domaine de coopération. Ce n’est pas beaucoup.
Risque de greenwashing
Le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) se défend déjà des nombreuses critiques en disant qu’il y aura un chapitre conséquent sur le développement durable. Mais il ne sera pas exécutoire, càd que ses violations éventuelles ne pourront pas faire l’objet de sanctions. Quant aux dispositions sur le changement climatique strictu sensu, on attend de voir, mais dans les accords de libre-échange de la Suisse les parties s’engagent habituellement à réaliser leurs obligations en vertu de l’accord de Paris et à promouvoir la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. C’est maigre.
La Suisse aurait pu s’inspirer de l’ALE avec l’Indonésie et proposer une approche PPM (Process and Production Method) pour les produits sensibles, à savoir octroyer des concessions tarifaires seulement à ceux produits dans des conditions durables. Certes, cela aurait été plus difficile que pour l’huile de palme, pour laquelle il existe des standards internationaux, mais il aurait été possible d’en élaborer d’autres avec toutes les parties prenantes.
Le texte de l’accord n’est certes pas encore disponible. Mais à priori, les efforts pour lutter contre le changement climatique risquent de n’être pas mieux que du greenwashing.
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Glencore vs Colombie à propos de la mine Cerrejón
22.03.2022, Commerce et investissements
Alors qu’elle affirme vouloir sortir des énergies fossiles, la multinationale suisse Glencore est devenue la seule propriétaire de la plus grande mine de charbon à ciel ouvert d’Amérique latine. Elle a même porté plainte contre la Colombie.
L'Arroyo Bruno, un affluent d'une rivière très importante de La Guajira, a été détourné pour augmenter l'extraction de charbon d'une carrière appelée La Puente.
© Colectivo de Abogados José Alvear Restrepo (CAJAR)
Le 11 janvier, Glencore, le principal exportateur de charbon thermique au monde, annonçait le rachat des parts de BHP et Anglo American dans « Carbones » de Cerrejon, la plus grande mine de charbon à ciel ouvert d’Amérique latine et l’une des plus grandes du monde. La multinationale suisse a fait une bonne affaire : en ne déboursant au final que 101 millions USD grâce à l’augmentation de la demande et donc du prix du charbon, elle est devenue l’unique propriétaire de Cerrejon. Les deux autres entreprises ont vendu leurs parts sur pression de leurs actionnaires, qui les incitent à abandonner l’énergie fossile la plus polluante pour lutter contre la crise climatique. Pourtant Glencore ne s’est pas fait de scrupules, alors même qu’elle s’est engagée à réduire son empreinte totale d'émissions de 15 % d'ici à 2026, de 50 % d'ici à 2035 et à atteindre des activités à émissions totales nulles d'ici à 2050.
Une mine responsable de graves violations des droits humains
« La mine de charbon de Cerrejon est exploitée depuis tellement d’années – cela a commencé en 1985 – que les abus de pouvoir et l’asymétrie qui existent entre les propriétaires, les communautés et l'État sont largement documentés. Ils se traduisent dans de graves violations des droits humains des communautés afro-indigènes, à commencer par les Wayuu » nous explique Rosa Maria Mateus de CAJAR, un collectif d’avocats colombiens qui défend les droits humains depuis quarante ans.
« Carbones del Cerrejón a été déclarée responsable à de multiples reprises et a fait l’objet de plus de sept décisions judiciaires », continue-t-elle. Mais les peines ne sont jamais appliquées car elle profite de l'extrême pauvreté de ces communautés. La Guajira, où se trouve la mine, est le deuxième département le plus corrompu de Colombie. Les enfants meurent de faim et de soif et l'entreprise en profite pour offrir des compensations insuffisantes aux yeux des communautés. Nous devons changer le modèle économique et abandonner le charbon pour faire face à la crise climatique dont les habitants de La Guajira sont les premières victimes ».
Détournement de l’Arrojo Bruno condamné par la Cour constitutionnelle
L'un de ces arrêts concerne le cas de l'Arroyo Bruno, un affluent d'une rivière très importante de La Guajira qui a été détourné pour augmenter l'extraction de charbon d'une carrière appelée La Puente. Ce cours d'eau est entouré de la forêt tropicale sèche, un écosystème gravement menacé. En 2017, la Cour constitutionnelle colombienne a jugé qu'en autorisant cette expansion, d'importants impacts sociaux et environnementaux sur les droits des communautés locales n'avaient pas été pris en compte. Il s'agit notamment de la grande vulnérabilité au changement climatique de la région, qui souffre d’une grave pénurie d’eau.
La Cour a bloqué les travaux, ordonnant une nouvelle étude d’impact pour déterminer la viabilité de l'expansion minière en termes de protection des droits des communautés. En représailles, Glencore a porté plainte contre la Colombie auprès du CIRDI, le tribunal de la Banque mondiale, en invoquant le non-respect de l'accord de protection des investissements entre la Colombie et la Suisse. Dans son action en justice, la multinationale affirme que la décision du tribunal colombien concernant le cours de l'Arroyo Bruno, qui a empêché l'augmentation de l'exploitation minière, est une « mesure déraisonnable, incohérente et discriminatoire ». Pour l'instant, un arbitre a été nommé, mais on n'en sait pas plus, à commencer par les indemnités réclamées par Glencore.
« C'est un comble de vouloir être dédommagés pour les dégâts qu’on a causés ! » S’indigne Rosa Maria Mateus. « L'entreprise prétend qu'elle a des politiques environnementales, qu'elle plante des arbres, mais nous avons constaté qu’elle ment. Elle ne respecte pas les standards environnementaux et ne parvient même pas à réparer un minimum des dommages causés. Nous avons pu prouver la pollution de l'eau et de l’air et l’impact négatif sur la santé de la population. C’est très grave, d’autant plus qu’en Europe on parle de décarbonation et de laisser le charbon dans le sol. »
Exploration des possibilités d’un Amicus curiae
Alors, que fait CAJAR ? Rosa Maria Mateus avoue que les possibilités d'action sont limitées. La seule est l'Amicus curiae, un exposé pour faire entendre la voix des communautés, mais il doit être autorisé par le tribunal d'investissement qui, selon elle, n'offre aucune garantie pour les victimes car il s'agit d'une sorte de justice privée créée pour protéger les grandes entreprises. « Mais nous allons essayer de le faire quand même et nous venons de commencer à recueillir les arguments des communautés. Ensuite, nous voulons transmettre l'Amicus curiae à des organisations amies telles qu'Alliance Sud, afin qu'elles nous aident à faire connaître la situation. Les entreprises ont un grand pouvoir médiatique, ce sont leurs vérités qui sont connues, pas les tragédies des victimes. Glencore a extrait beaucoup de ressources de Colombie, bien que l'économie du pays soit très faible. Elle représente une menace pour la souveraineté de l'État et surtout pour les tribunaux dont elle conteste la juridiction, reproduisant ainsi les pratiques coloniales. »
Troisième plainte de Glencore contre la Colombie
La Colombie fait face à un déferlement de 17 plaintes au bas mot selon la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED), qui ne recense toutefois pas la dernière de Glencore. C’est la multinationale suisse qui a ouvert la voie en 2016, contestant un contrat relatif à la mine de charbon de Prodeco pour lequel elle a obtenu 19 millions USD de réparation.
Ces plaintes sont jugées par un tribunal composé de trois arbitres – l’un nommé par la multinationale étrangère, l’autre par le pays attaqué et le troisième par les deux parties. Les tribunaux peuvent accepter des Amicus curiae, à savoir des soumissions le plus souvent écrites présentant habituellement les points de vue des communautés affectées et déposées par des ONG. A ce jour, 85 demandes d’Amicus curiae ont été présentées, dont 56 ont été acceptées. L’accord de protection des investissements avec la Colombie, sur lequel repose la plainte de Glencore, ne prévoit pas la possibilité d’un Amicus curiae. Cet accord va être renégocié et, même s’il ne constituera pas la base légale de cette plainte, Alliance Sud demande que cette possibilité y soit intégrée.
L'avocate Rosa Maria Mateus sera le 2 mai à Lausanne et le 3 mai à Genève pour parler de ce cas.
© Rosa María Mateus
« Les enfants meurent de faim et de soif et l'entreprise en profite pour offrir des compensations insuffisantes aux yeux des communautés. Nous devons changer le modèle économique et abandonner le charbon pour faire face à la crise climatique dont les habitants de La Guajira sont les premières victimes. »
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Medienmitteilung
La Suisse bloque la dérogation COVID-19
10.06.2022, Commerce et investissements
L’OMC se dirige vers un échec politique majeur dans sa réponse à la pandémie de coronavirus. Alors que sa 12ème Conférence ministérielle s’ouvre après-demain à Genève, les membres sont incapables de se mettre d’accord sur la demande de l’Inde et l’Afrique du Sud de suspendre les droits de propriété intellectuelle sur les vaccins, tests et médicaments anti-covid. Par son blocage systématique, la Suisse est en première ligne de cet échec multilatéral qui n’offre aucune solution cohérente pour un accès équitable aux moyens de lutte lors de crises sanitaires.
© Patrick Gilliéron Lopreno
La semaine prochaine, la crédibilité de l’OMC et de sa directrice générale Ngozi Okonjo-Iweala se jouera à Genève. Parmi les sujets à l’ordre du jour de la 12ème Conférence ministérielle (MC12), qui se tiendra du 12 au 15 juin, figure la dérogation ADPIC (ou « TRIPS waiver »), du nom de la demande de suspension temporaire des droits de propriété intellectuelle de production et de commercialisation des vaccins, tests et médicaments anti-covid déposée par l’Inde et l’Afrique du Sud en octobre 2020. Celle-ci avait été soutenue par une centaine de pays ainsi que de nombreuses organisations et personnalités internationales, mais les États hébergeant les grandes firmes pharmaceutiques comme la Suisse ont systématiquement fait blocage.
Si la Conférence MC12 accouche finalement d’un accord, on sera très loin d’une suspension généralisée des droits de propriété intellectuelle, au vu des derniers textes rendus publics. La décision sera tout au plus un rappel d’instruments déjà existants, comme la licence obligatoire, permettant à un État d’autoriser la commercialisation de génériques malgré l’existence d’un brevet. Or, d’autres droits exclusifs, comme les secrets d’affaires ou la protection des données d’homologation, sont des obstacles avérés à un accès équitable et au transfert de technologies, contre lesquels une licence obligatoire ne pourra rien. De plus, il faudra procéder produit par produit, pays par pays, sans compter les pressions diplomatiques et commerciales accompagnant systématiquement ce type de démarches. La seule concession pouvant s’apparenter à une dérogation concerne la possibilité pour un pays éligible de réexporter un vaccin produit sous licence obligatoire, mais de manière très limitée.
Ce texte, présenté comme « compromis » entre les États membres, est en vérité imposé par les pays occidentaux, dont la Suisse. À moins d’un revirement lors de la MC12, il ne résoudra pas la répartition inéquitable des moyens de lutte contre le Covid-19. D’abord, il ne concerne que les vaccins, alors que l’accès aux traitements et aux tests diagnostiques est tout aussi inéquitable du fait des droits exclusifs détenus par Pfizer, Roche et consorts. Ensuite, il exclut de nombreux pays de la possibilité d’y recourir pour des motifs commerciaux ou géopolitiques, alors que les règles de l’OMC sont censées s’appliquer partout, sans discrimination. Enfin, il érige de nouveaux obstacles pour les pays éligibles souhaitant recourir à ce mécanisme, créant un dangereux précédent qui entravera aussi la réponse à de futures pandémies.
Un tel accord est indigne de pays occidentaux comme la Suisse se disant respectueux des droits humains, dont le droit à la santé. En tant que pays hôte de la MC12, assurant par ailleurs, depuis mars dernier, la présidence de l’organe de décision suprême de l’OMC, la Suisse disposait pourtant des leviers nécessaires pour influencer positivement le résultat final. Même (sur)approvisionnée en vaccins, traitements et tests, elle a préféré privilégier les intérêts des pharmas, qui pourront ainsi continuer à décider qui en reçoit combien, quand et à quel prix. Le Covid-19 a montré que l’OMC ne disposait pas de règles adaptées pour répondre efficacement à une crise sanitaire mondiale, et il n’a rien fait pour les mettre en place durant dix-huit longs mois.
Informations:
Isolda Agazzi, Alliance Sud, Experte Commerce et Investissements, isolda.agazzi@alliancesud.ch, +41 21 612 00 97
Patrick Durisch, Expert Politique Santé, Public Eye, patrick.durisch@publiceye.ch, +41 21 620 03 06
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Des progrès, mais on peut mieux faire
27.09.2022, Commerce et investissements
Le nouvel accord de protection des investissements entre la Suisse et l’Indonésie permet à priori de réglementer dans l’intérêt public, mais il est assorti de dispositions qui pourraient réduire cette possibilité à néant.
Destruction de l’environnement sur les concessions de la plus grande entreprise indonésienne d’huile de palme à Kapuas Hulu, sur l’île de Bornéo.
© AFP PHOTO / ROMEO GACAD
L’Indonésie est l’un des rares pays à avoir dénoncé pratiquement tous ses accords de protection des investissements (API) - y compris celui avec la Suisse en 2016 - après avoir fait face à des arbitrages qui lui ont couté des millions de dollars. Mais dans les renégociations Djakarta fait face à l’opposition des pays industrialisés, sans compter que son nouveau modèle d’accord ne contient pas certaines des innovations fréquentes dans la pratique récente des traités d'investissement.
La Confédération aussi a renégocié un traité, mis en consultation pour la première fois à l’été 2022. « Le nouvel accord de protection des investissements entre la Suisse et l’Indonésie contient des innovations importantes et reprend de bonnes pratiques récentes. Par rapport à l’ancien, il constitue un progrès indéniable, mais pour un accord conclu en 2022, il était possible d’aller plus loin sur certaines aspects », nous déclare d’emblée Suzy Nikièma, la responsable des investissements durables à l’Institut international pour le développement durable (IISD), un Think Tank international qui fournit de l’assistance technique et des opportunités de collaboration, conduit des recherches et propose des solutions pour que les investissements soient des vecteurs du développement durable.
Traités ne promeuvent pas le développement durable
Aujourd’hui, tout le monde s’accorde sur le fait que ces traités d’investissement posent un problème, mais quoi faire ? Comme le note Suzy Nikièma, « ils ont été conçu dans le contexte de la décolonisation et de la guerre froide pour protéger les droits des investisseurs opérant à l’étranger, à une époque où le développement durable n’était pas une préoccupation centrale. Il est donc crucial de repenser le rôle, la valeur ajoutée et le contenu de ces puissants instruments à l’aune des enjeux et des objectifs actuels ».
Comme le note également Josef Ostřanský, Conseiller en droit et politique des investissements à IISD, le traité avec la Suisse a une définition large de l’investissement et ne fait pas de distinction entre investissement polluant à forte intensité de carbone et investissement à faibles émissions. Il s’agit là du principal problème de ce traité. En effet, il n’y a aucun moyen de filtrer les entreprises étrangères, donc le traité protégera même une entreprise minière suisse qui pollue en Indonésie. Il faut bien le reconnaître : cette distinction n’existe à ce jour dans aucun traité, mais la Suisse pourrait montrer la voie.
Investisseurs mieux définis, mais avec très peu d’obligations
La définition de l’investisseur, en revanche, devenue plus précise, permet d’éviter le treaty-shopping, à savoir le fait d’utiliser un traité plus favorable conclu par un autre pays. Est défini comme investisseur toute personne physique détentrice de la nationalité ou toute personne morale qui mène des activités économiques substantielles dans le pays, y est immatriculée et y dispose d’un siège social.
En revanche, ces mêmes investisseurs sont soumis à très peu d’obligations : deux petits articles seulement sur 44 sont consacrés à la responsabilité sociale des entreprises et à la lutte contre la corruption, mais de façon purement exhortative. Ils ne précisent aucun mécanisme d’application ni aucune conséquence juridique de leur violation.
Des efforts ont été consentis pour clarifier le traitement juste et équitable, la clause de la nation la plus favorisée et le droit de réglementer. Mais ceux-ci pourraient être réduits à néant par un article étonnant (37) qui stipule que les investisseurs peuvent se prévaloir du régime juridique le plus favorable applicable entre les parties. Il s’agit de l’une des dispositions les plus problématiques de l’API et, pour Alliance Sud, il faut la supprimer.
Plainte pour licence obligatoire exclue de la portée de l’expropriation
En revanche, Alliance Sud salue le fait que l’API spécifie dans l’Annexe A que les mesures réglementaires d’intérêt public visant à protéger la santé publique, la sécurité et l’environnement ne puissent pas être considérées comme une expropriation indirecte et donner lieu à des compensations financières. Mais certaines formulations pourraient en réduire drastiquement l’impact, car il ajoute « sauf en de rares circonstances où l’impact d’une mesure ou d’une série de mesures est si grave au regard de leur but qu’elles semblent manifestement excessives ». Il faut donc supprimer cette partie de l’annexe A.
En revanche, l’art. 7 al. 6 est le bienvenu, car il prévoit que l’expropriation indirecte ne s’applique pas à la délivrance de licences obligatoires accordées conformément à l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Alliance Sud a dénoncé à maintes reprises la pression exercée par la Suisse sur la Colombie pour qu’elle renonce à émettre une licence obligatoire du Glivec (un anti-cancéreux fabriqué par Novartis), tout comme la menace de plainte de Novartis contre la Colombie sur la base de l’API Suisse – Colombie. Le nouvel article devrait rendre ce genre de plaintes impossibles.
ISDS toujours là
Finalement, l’un des principaux problèmes du nouveau traité est que le mécanisme de règlement des différends investisseur – Etat (ISDS) par voie d’arbitrage est toujours là. Il n’y a pas non plus d’obligation de recourir aux tribunaux nationaux, et encore moins d’épuiser au préalable les voies de recours internes. La participation de parties tierces au litige comme pour l’amicus curiae (amis de la cour) n’est pas prévue et la médiation, bien qu’envisagée, reste facultative.
Alliance Sud a pourtant travaillé avec Rambod Behboodi, un avocat de droit international, pour élaborer une proposition visant à renforcer et à promouvoir la conciliation et la médiation dans les plaintes commerciales et d'investissement. La proposition, élaborée principalement dans l'optique de l'OMC, comporte des éléments structurels et institutionnels transposables aux traités d’investissement, moyennant quelques adaptations.
Ne pas inclure l’ISDS dans un traité d’investissement est possible. Comme l’indique Abas Kinda, Conseiller en droit international à l’IISD, « le nouvel modèle d’accord du Brésil met l’accent sur la prévention, la médiation et le règlement des différends d’Etat à Etat et ne prévoit pas l’ISDS ».
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Bericht
Études d’impact font fi des droits humains
07.10.2022, Commerce et investissements
La méthodologie proposée par le Conseil fédéral pour mesurer l’impact des accords de libre-échange sur le développement durable est très maigre en ce qui concerne les droits humains. Alliance Sud propose des pistes pour corriger le tir.
Le rapport du Conseil fédéral est trop focalisé sur l’accès au marché.
© KEYSTONE/IMAGEBROKER/RAIMUND FRANKEN
Après des années d’effort, les tentatives d’Alliance Sud pour obtenir du Conseil fédéral la réalisation d’études d’impact ex-ante des accords de libre-échange sur les droits humains commencent à porter leur fruit. Le 25 mai 2022, celui-ci a enfin présenté le rapport demandé par le postulat 19.3011 de la Commission de gestion du Conseil national le 1er mars 2019, lui demandant de rechercher une méthode pour évaluer l’impact des accords de libre-échange sur le développement durable.
Alliance Sud salue la présentation de ce rapport, mais elle regrette qu’il soit très pauvre sur les droits humains. Pourtant, des méthodologies existent pour mesurer par exemple l’impact sur les droits à la santé et à l’alimentation, comme démontré par la proto-étude d’impact de l’accord de libre-échange avec le Mercosur réalisée par la juriste Caroline Dommen pour le compte d’Alliance Sud.
Alliance Sud a mandaté à nouveau Caroline Dommen, spécialiste reconnue en la matière, pour écrire une réponse au rapport du Conseil fédéral, que vous trouverez ici. Celle-ci regrette notamment la focalisation excessive sur l’accès au marché et le manque de reconnaissance des méthodologies et connaissances pertinentes. Et elle invite à ne pas utiliser le manque de données comme prétexte pour ne pas agir.
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Quand le troc de semences est passible de prison
02.12.2022, Commerce et investissements
Sept organisations ont manifesté ce vendredi sur la Place fédérale contre l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV), qui criminalise dans le monde entier des paysan·ne·s souhaitant réutiliser leur semences.
Habillé·e·s en prisonnières et prisonniers, des militant·e·s de plusieurs organisations suisses ont manifesté aujourd’hui sur la Place fédérale, symbolisant les paysannes et les paysans criminalisé·e·s par les règles de l’UPOV et par l’inscription dans la législation locale d’un droit de propriété intellectuelle apparenté à un brevet accordé sur les semences. Cette action s’inscrit dans le cadre d’une protestation mondiale contre l’UPOV et le monopole dont font l’objet les semences.
Les militant·e·s ont remis leur revendication au Parlement : la Suisse doit s’abstenir d’exiger l’inscription d’une clause UPOV dans les futurs accords de libre-échange. Le conseiller national Nicolas Walder, qui a accusé réception de cette revendication, déposera la semaine prochaine une initiative parlementaire avec sa collègue Christine Badertscher pour demander de rayer cette exigence inacceptable des accords de libre-échange. Les partenaires commerciaux de la Suisse doivent en effet pouvoir continuer à être libres d’adopter des lois sur les semences qui tiennent compte de leur situation, qui respectent les droits des paysannes et des paysans, et qui favorisent la souveraineté alimentaire.
Depuis des millénaires, des paysannes et des paysans conservent, multiplient, plantent, échangent ou vendent les semences qu’elles·ils produisent, une pratique à la base de la souveraineté alimentaire et indispensable à la sécurité alimentaire des pays de l’hémisphère Sud. Le système semencier paysan se porte ainsi garant de l’approvisionnement en semences et joue un rôle clé dans la préservation et le développement de la diversité de nos plantes cultivées. C’est pour ces raisons que le droit de libre utilisation des semences a été inscrit dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysan·ne·s et dans le Traité international sur les ressources phytogénétiques de la FAO.
Or, c’est précisément l’exercice de ce droit que l’UPOV criminalise en interdisant aux paysannes et aux paysans d’échanger ou de vendre les semences enregistrées qu’elles·ils produisent sur leurs champs. Même la réutilisation est souvent interdite ou soumise à redevances. Le Ghana, dernier pays à avoir rejoint l’UPOV, va jusqu’à prévoir une peine d’emprisonnement de dix ans au moins. De la sorte, on fait d’un droit élémentaire un acte criminel.
En sa qualité de membre de l’AELE*, la Suisse contraint les pays avec lesquels elle conclut des accords de libre-échange à adhérer aux règles de l’UPOV, une exigence pour ainsi dire cynique, puisque le Liechtenstein n’applique pas du tout ces règles et la Norvège ne le fait que partiellement, octroyant de la sorte davantage de libertés à ses paysannes et paysans. Même la Suisse a interprété ces règles de sorte qu’elles ne satisfont pas aux exigences de l’UPOV. Dès lors, les pays membres de l’AELE imposent à leurs partenaires commerciaux l’adoption de règles plus strictes que celles qu’ils sont disposés à appliquer eux-mêmes. Le prochain accord sur la liste est l’accord de libre-échange négocié avec la Thaïlande, pays dans lequel la société civile et les organisations paysannes s’opposent énergiquement aux règles de l’UPOV afin de défendre leur droit aux semences et, par conséquent, leur droit à l’alimentation.
* L’Association européenne de libre-échange (AELE) compte quatre membres : la Suisse, l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège.
Plus d’informations: Coalition suisse pour le droit aux semences
Personnes de contact:
Simon Degelo, responsable semences et biodiversité chez SWISSAID, Tél. : +41 76 824 00 46, s.degelo@swissaid.ch
Nicolas Walder, conseiller national des Vert·e·s, Tél. : +41 79 550 05 13, nicolas.walder@parl.ch
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Article
La Suisse doit résilier la Charte de l’énergie
05.12.2022, Commerce et investissements
De plus en plus de pays se retirent du Traité sur la Charte de l’Energie, qui protège les investissements dans les énergies, mêmes fossiles, et retarde la transition énergétique. Pour Alliance Sud, la Suisse aussi devrait le faire.
La fuite du gazoduc Nord Stream dans la mer Baltique, photographiée par les satellites Pléiades Neo.
© AFP Photo / Airbus DS 2022 / Keystone
En 2019, le Nord Stream 2 a porté plainte contre l’UE, lui reprochant sa décision d’amender une nouvelle directive sur le gaz afin d’imposer les mêmes standards aux pipelines opérant à l’intérieur de son territoire qu’à ceux qui y entrent. L’entreprise affirme que ces dispositions violent, entre autres, les clauses du traitement juste et équitable, de la nation la plus favorisée et de l’expropriation indirecte contenues dans le Traité sur la Charte de l’Energie (TCE).
Or Nord Stream 2, censé transporter du gaz naturel de la Russie à l’Allemagne, était – elle a fait faillite au début de l’année – une entreprise suisse : bien qu’appartenant à la compagnie d’Etat russe Gazprom, son siège était à Zoug. Ceci dit, ce pipeline controversé n’est jamais entré en fonction, après que l’Allemagne a bloqué le projet le 22 février, suite à l’invasion russe de l’Ukraine.
Six plaintes d’investisseurs suisses sur la base de la Charte de l’Energie
Sur les 43 plaintes connues d’investisseurs suisses devant des tribunaux arbitraux, six reposent sur la Charte de l’Energie : trois contre l’Espagne (deux sont encore en cours et une a été remportée par l’investisseur, Operafund, qui reprochait à Madrid des réformes dans le secteur des énergies renouvelables, y compris une taxe de 7% sur les revenus et une réduction des subventions aux producteurs; une contre la Roumanie par Alpiq, qui a perdu ; et une contre la Pologne, perdue par l’investisseur suisse, Festorino).
L’Espagne doit faire face à un record de cinquante plaintes au bas mot sur la base de ce traité controversé, la plupart du temps pour avoir coupé les subventions aux énergies renouvelables. Selon les calculs du Transnational Institute, les dédommagements réclamés par les investisseurs étrangers dépasseraient les 7 milliards d’euros au moins ! Dès lors, ce n’est pas étonnant que Madrid ait décidé de résilier le traité, tout comme la France, la Pologne, les Pays-Bas et l’Allemagne. La Belgique et d’autres pays européens sont en train d’y réfléchir. « Je regarde avec inquiétude revenir les hydrocarbures et les énergies fossiles les plus polluantes, a déclaré Emmanuel Macron, cité par « Le Monde ». La guerre sur le sol européen ne doit pas nous faire oublier nos exigences climatiques et notre impératif de réduction des émissions de CO2. Le fait de nous retirer de ce traité est un élément de cette stratégie. »
Selon les derniers chiffres publiés par le secrétariat de la Charte, 142 plaintes ont été déposées sur la base de ce traité, mais elles pourraient être beaucoup plus nombreuses car les Etats n’ont pas l’obligation de les notifier. C’est de loin le traité qui a donné lieu au plus grand nombre de plaintes. L’Allemagne elle-même a été attaquée à deux reprises pour sa décision de sortir du nucléaire : dans le cas Vattenfall vs Germany I, le montant de la compensation versée par Berlin à l’entreprise suédoise n’est pas connu ; dans Vattenfall vs. Germany II, la compagnie suédoise a obtenu 1'721 milliards USD de dédommagement.
La Suisse, jamais attaquée, n’a pas l’intention de sortir
La Suisse, quant à elle, n’a jamais fait l’objet d’aucune plainte sur la base du TCE – en tout et pour tout, elle a fait l’objet d’une seule plainte de la part d’un investisseur des Seychelles, encore en cours. Dès lors, va-t-elle quitter le traité ? « Non », nous répond Jean-Christophe Füeg, chef des affaires internationales à l’Office fédéral de l’énergie, s’empressant d’ajouter que « les critiques de ce traité ignorent que celui-ci s’applique uniquement aux investissements étrangers. En d’autres termes, les investissements domestiques ou provenant de pays non-parties (Etats-Unis, Norvège, Chine, pays du Golfe, Australie, Canada…) ne sont pas couverts. »
Selon lui, la version modernisée de cette Charte, approuvée par le Conseil fédéral le 22 novembre, devrait permettre de réduire drastiquement les plaintes et de limiter la portée du traité : « L’UE comptera désormais comme une seule partie, ce qui veut dire que des plaintes d’investisseurs à l’intérieur de l’UE seront désormais exclues, ajoute-t-il. Cela réduit le TCE à un traité entre l’UE, la Grande-Bretagne, le Japon, la Turquie, l’Ukraine, l’Azerbaïdjan et la Suisse, les autres parties n’ayant quasiment pas d’investisseurs. Or, plus de 95% des investissements fossiles au sein de l’UE sont soit intra-UE, soit de non-parties. Ceci permet p.ex. à certains Etats membres de l’UE de poursuivre gaiement l’exploration d’hydrocarbures (p.ex. Chypre, la Roumanie, la Grèce et même les Pays-Bas). Il est donc difficile d’adhérer à l’argument selon lequel il est vital pour le climat de viser moins de 5% des investissements fossiles par un retrait tout en épargnant les 95% restants »
Selon lui, ce traité est important pour protéger les intérêts des investisseurs étrangers en Suisse et vice versa : selon un sondage parmi les investisseurs suisses ayant des investissements dans l’UE, ceux-ci i affirment apprécier la protection juridique que l’ECT leur apporte. « Une sortie de la Suisse irait à l’encontre de leurs intérêts », conclue-t-il.
Pour Alliance Sud, la Suisse doit sortir
Même la version modernisée de la Charte, pourtant insuffisante pour lutter contre le changement climatique, n’est pas près d’entrer en vigueur. Alors qu’elle devait être approuvée par les Etats parties lors d’une réunion le 22 novembre à Oulan Bator, en Mongolie, la modernisation a été retirée de l’agenda après que les Etats membres de l’UE ne sont pas arrivés à s’entendre.
Pour Alliance Sud, la Suisse doit se joindre aux autres pays européens qui ont déjà franchi le pas et quitter ce traité qui permet à un investisseur étranger de porter plainte contre un Etat hôte pour tout changement réglementaire – fermeture d’une centrale à charbon, sortie du nucléaire, changement de réglementation dans les énergies renouvelables, etc. – et donc freine la transition énergétique et la lutte contre le changement climatique. Il n’est pas acceptable que les investisseurs étrangers dans les énergies fossiles soient au-dessus des lois nationales et qu’ils aient recours à une justice privée qui leur accorde trop souvent des millions, voire des milliards de dédommagement.
Un traité obsolète
Le Traité sur la Charte de l’énergie, en vigueur depuis 1998, protège les investissements dans l’énergie, dont les énergies fossiles. Il compte 53 Etats parties, pour la plupart des pays industrialisés, dont la Suisse et l’UE, mais pas seulement : l’Afghanistan, le Yémen, la Mongolie et les pays d’Asie centrale y ont adhéré aussi. Il permet à un investisseur d’un Etat partie de porter plainte contre un autre Etat partie pour tout changement de politique ou de réglementation qui nuirait à ses intérêts.
C’est de loin de le traité sur lequel repose le plus grand nombre de plaintes. Celles-ci sont jugées dans la plus grande opacité par un tribunal arbitral composé de trois arbitres, selon le mécanisme de règlement des différends investisseurs – Etats (ISDS) et sans l’obligation de passer au préalable devant les tribunaux internes. C’est un outil puissant aux mains des grandes sociétés gazières, pétrolières et du charbon pour dissuader les gouvernements d’effectuer la transition vers les énergies propres.
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