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Nations Unies
Plus importantes que jamais après 80 ans
24.10.2025, Coopération internationale, Agenda 2030
Le multilatéralisme est en crise. Pourtant, la Charte des Nations Unies est loin d'être obsolète. Elle nous rappelle la promesse d'un monde meilleur, possible uniquement grâce à la coopération internationale et à la décolonisation.
Durant les derniers mois de la guerre, à l'été 1945, des délégations du monde entier négocient la Charte de l’ONU à San Francisco, avec la participation d'une majorité de pays du Sud global, qui ont joué un rôle déterminant dans le développement de l'ONU.
© Keystone / Photopress-Archiv / Str
Il y a 80 ans, le 24 octobre 1945, la Charte de l'ONU entrait en vigueur. Selon ses pères (et ses quelques mères) spirituels, issus des États-Unis et des puissances européennes encore coloniales, elle devait servir à préserver la paix sur la base du droit international (après l’échec de la Société des Nations) et renforcer la légitimité de l'ordre d'après-guerre grâce à l'adhésion universelle. Mais il ne fallait pas que la légitimité soit trop grande. Le Conseil de sécurité devait assurer, pour les puissances possédant un droit de veto, que le pouvoir ne puisse pas leur être arraché des mains.
Que l'ONU doive également traiter des questions économiques n'était pas prévu, car les futures puissances victorieuses avaient déjà instauré l'ordre économique d'après-guerre à Bretton Woods, en 1944. Les pays du Sud global – s'ils étaient déjà indépendants (comme en Amérique latine) ou partiellement autonomes (comme l'Inde) – n’étaient que marginalement représentés. Par conséquent, leur désir d'être soutenus, et non entravés, dans leur développement fut peu entendu. Au sein des instances décisionnelles, le principe « un dollar, une voix » les réduisait de fait au silence.
Les pays d'Amérique latine, en particulier, espéraient que le principe « un pays, une voix » changerait la donne à l'ONU (ils comptaient plus de membres fondateurs que l'Europe). Avec les autres pays du Sud global, ils avaient milité avec succès pour l’adoption d’un chapitre « Coopération économique et sociale internationale » et la création d’un Conseil économique et social. L'article 55 du chapitre en question précise que l'ONU doit favoriser « le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l’ordre économique et social ».
Il n'était pas prévu non plus que l'ONU jouerait un rôle central dans la décolonisation. Pourtant, celle-ci devint rapidement l'une de ses principales activités et joua un rôle crucial en ouvrant la voie à l'indépendance de nombreux pays. Le deuxième Secrétaire général de l'ONU, Dag Hammarskjöld, paya de sa vie son engagement : il périt avec quinze autres personnes dans un accident d'avion alors qu'il tentait une médiation dans le conflit concernant la région séparatiste du Katanga, riche en ressources, au sein du Congo nouvellement indépendant. Malgré de nombreuses enquêtes, on ne sait toujours pas si son avion a été abattu et, le cas échéant, par qui. Dans d'autres pays, des guerres par procuration éclatèrent pendant et après la décolonisation entre les États-Unis et l'Union soviétique, puissances disposant du droit de veto ; l'ONU s’est montrée impuissante face à leurs jeux de pouvoir.
La fin du colonialisme (formel et politique) a élargi l'organisation mondiale à de nombreux nouveaux membres. Cette situation semble susciter un tel malaise à la NZZ, dans son dénigrement de l’ONU et dans les coups que le quotidien lui porte, que le racisme est à peine voilé entre les lignes : « L'ONU n'est plus la même organisation qu'en 1945 et s'est éloignée de ses principes fondateurs. À l'époque, l'ONU comptait 51 membres, majoritairement occidentaux. Aujourd'hui, il y en a 193. » Cette affirmation est également inexacte : l'ONU ne comptait que 12 membres fondateurs occidentaux.
Parmi les plus grandes et importantes réussites de l'ONU figure l'obtention, après un long et âpre processus entamé en 1967, d'un consensus mondial sur l'interdépendance des enjeux environnementaux et de développement, ne pouvant être abordés que conjointement. Malgré la complexité de l'adhésion universelle, les pays ne disposant de droits égaux qu'à l'Assemblée générale, l'ONU est parvenue à mettre en place des mécanismes de lutte contre le changement climatique : un organe scientifique intergouvernemental (le GIEC) qui éclaire les processus multilatéraux en se fondant sur le consensus des connaissances actuelles, une convention-cadre et un protocole de suivi. Enfin, face à l'échec des réductions contraignantes des émissions, l'accord de Paris a instauré un processus qui, malgré son caractère volontaire, a permis des avancées. Ce n'est pas la faute de l'ONU si la gestion de la crise climatique a atteint son niveau le plus critique. Elle est due au pouvoir des (plus) puissants : de Bush (qui a refusé de signer la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques) à Trump 2 (no comment). Et non, journalistes de la NZZ, Trump ne provoque pas un « choc salutaire », contrairement à ce qu'affirmait le titre de l'article susmentionné.
Un texte commémoratif ne devrait pas ressembler à un éloge funèbre. Voici donc l'article 55 de la Charte des Nations Unies dans sa version originale, comme un écho porteur de la promesse d'un monde meilleur :
« En vue de créer les conditions de stabilité et de bien-être nécessaires pour assurer entre les nations des relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, les Nations Unies favoriseront :
a) le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et des conditions de progrès et de développement dans l'ordre économique et social ;
b) la solution des problèmes internationaux dans les domaines économique, social, de la santé publique et autres problèmes connexes, et la coopération internationale dans les domaines de la culture intellectuelle et de l'éducation ;
c) le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion. »
PERSPECTIVE SUD
L’Afrique au rendez-vous de la transition énergétique
02.10.2025, Justice climatique
Il est temps de promouvoir des pratiques d’extraction responsable pour permettre à l’Afrique de maximiser les retombées de ses réserves stratégiques en minerais de transition. Et pour assurer l’amélioration des conditions de vie de ses citoyen·ne·s et la réduction des impacts sociaux et environnementaux. Par Emmanuel Mbolela.
A qui profite le coltan qui booste notre avenir ? Les mines de Rubaya sont au coeur de la guerre entre la milice du M23, le Congo et le Rwanda. © Eduardo Soteras Jalil / Panos Pictures
La transition énergétique mondiale se présente comme un impératif crucial dans la lutte contre le réchauffement climatique et l’avènement d’un avenir énergétique durable pour les générations futures. Elle s’impose depuis une dizaine d’année dans le débat politique et public des pays du Nord et du Sud. Dans ce débat, l’Afrique se présente comme un continent solution grâce à sa biodiversité exceptionnelle qui lui confère incontestablement le rôle clé de puits de carbone mondiale. Grâce aussi à son sous-sol contenant les différents minerais de transition (cuivre, cobalt, lithium, nickel, coltan, tantale) dont le monde a besoin pour la fabrication des batteries des véhicules électriques, le stockage d’énergies renouvelables ainsi que les technologies innovantes essentielles à la transition énergétique globale. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la demande de ces minerais augmentera de quatre à six fois d’ici 2040.
Cependant une question reste posée au sort réservé à ce continent producteur et fournisseur de ces matières premières stratégiques. L’Afrique sera-t-elle encore utilisée comme une simple vache à lait ou ce processus de transition énergétique contribuera-t-il à son émergence ?
Afrique a toujours été au centre des transformations majeures qui ont conduit à l’industrialisation des nations, et cela, en payant un prix fort.
L’histoire se répète
Pour la petite histoire, l’Afrique, grâce à sa population et ses ressources naturelles, a toujours été au centre des transformations majeures qui ont conduit à l’industrialisation des nations, et cela, en payant un prix fort. C’est le cas de la traite des Noirs où les Africains ont été embarqués de force et transportés dans les bateaux dans des conditions inhumaines pour être vendus en Amérique afin de travailler dans les plantations de cannes à sucre et de coton. Nous citerons encore l’exemple du caoutchouc qui fut utilisé dans la fabrication de pneus gonflables, qui a révolutionné le domaine de l’industrie automobile mais dont l’extraction a laissé des souvenirs douloureux dans les pays africains producteurs. On n’oubliera jamais les violences physiques (mains coupées, prise d’otage des femmes et des enfants) instituées au Congo par le roi Léopold II de la Belgique pour pousser la population à extraire davantage cet or blanc dont la vente n’a servi qu’à l’enrichissement personnel du roi et au développement de son royaume de Belgique. La révolution industrielle du 20e siècle a été rendue possible grâce aux matières premières fournies par l’Afrique. Que dire de l’uranium extrait au sud de la République démocratique du Congo, qui fut utilisé dans la fabrication de la bombe atomique qui a permis de mettre fin à la deuxième guerre mondiale ? Pas plus que hier le développement des nouvelles technologies de la communication et de l’information de notre ère a fait encore recours à l’Afrique pour obtenir les matières premières, notamment le coltan qui est utilisé dans la fabrication des téléphones et des ordinateurs portables.
Paradoxalement, l’Afrique se retrouve au bas de l’échelle. Ses fils et filles sont poussés à l’errance, à la recherche d’un Eldorado. Ils meurent dans le désert et dans la mer sous le regard complice et coupable de ceux et celles qui ont les moyens de les sauver, mais qui refusent de le faire sous prétexte que cela provoquerait un appel d’air.
Emmanuel Mbolela est titulaire d’un diplôme de Master en Economie Appliquée, parcours « Nouveaux environnements économiques et entrepreneuriat éthique » de l’Université d’Angers en France.
Il est militant et défenseur des droits fondamentaux des migrants et l’auteur du livre « Réfugié : Une odyssée africaine ». Il est le fondateur de l’Association des réfugiés et des communautés migrantes et l’initiateur du projet de la maison d’hébergement qui offre un logement temporaire et d’urgence aux femmes migrantes et à leurs enfants.
Aujourd'hui, l'Afrique est à nouveau sollicitée : en tant que puits de carbone contre le réchauffement climatique et fournisseur de matières premières essentielles à la transition énergétique.
Aujourd’hui, l’Afrique est à nouveau sollicitée. Elle répond présente comme elle l’a toujours fait à tous les rendez-vous de l’histoire ayant marqué l’industrialisation des nations. Et cette fois-ci, elle se présente à nouveau comme continent solution en tant que puits de carbone contre le réchauffement climatique et fournisseur de matières premières essentielles à la transition énergétique.
Pourtant, si les révolutions industrielles antérieures ont contribué au développement des pays occidentaux et amélioré la qualité de vie de leurs populations, en Afrique, c’est le sang qui coule et des souvenirs douloureux. La République démocratique du Congo, par exemple, est plongée depuis 30 ans dans une guerre de dépeuplement et repeuplement dans sa partie est où l’on retrouve de gigantesques mines de minerais de transition. Ce conflit armé, bien que le pays ne dispose pas d’une usine d’armement, a déjà fait des millions de morts, des centaines de milliers de déplacés internes et de réfugiés. Le viol des femmes et des enfants est pratiqué à grande échelle et utilisé comme une arme de guerre dans le but de pousser la population à quitter les villes et les villages et à laisser leurs terres qui sont immédiatement récupérées pour l’exploitation de minerais.
La croissance exponentielle de la demande de ces minerais fait que nous assistons actuellement aux pratiques prédatrices et illicites dans leur exploitation : les enfants sont utilisés dans les mines, les conflits armés sont intelligemment provoqués, et les accords sont signés dans toute opacité non seulement par les entreprises multinationales, mais aussi par des Etats. Nous citerons l’accord signé en février 2024 par l’Union européenne et le Rwanda sur la commercialisation des matières premières critiques. Il intervient au moment où ce pays a envahi son voisin la RDC et que l’UE sait bien que le Rwanda ne dispose pas de mines de ces métaux et que les minerais qu’il offre sur le marché international proviennent de pillages opérés en RDC.
Minerai de cobalt provenant des mines congolaises de Shabara, où des milliers de personnes creusent dans des conditions déplorables dans une zone contrôlée par Glencore. © Pascal Maitre / Panos Pictures
Le 27 juin, un accord de paix entre la RDC et le Rwanda vient d’être signé à Washington sous la médiation de l’administration Trump. Cet accord qui a été précédé par des négociations entre les autorités américaines et congolaises sur l’exploitation de matières premières rares, s’inscrit dans la logique du président Trump d’échanger la paix contre les minerais stratégiques. C’est l’administration du businessman – le président Trump se dit prête à mettre fin à l’agression dont la RDC est l’objet de la part de son voisin le Rwanda à condition qu’elle coopère avec les Etats-Unis pour l’exploitation de ses ressources minières. L’on comprend dès lors qu’en réalité cet accord tant vanté par Donald Trump n’est qu’une ouverture des portes aux Etats-Unis pour accéder aux minerais essentiels pour la technologie mondiale.
Les multinationales sont animées par le crédo de maximisation du profit et elles ne sont pas intéressées à la création d‘emplois stables ni à des pratiques d’exploitation durables.
Inévitablement un tel accord conduira à la fois vers une paix sans pain et à l’éclatement d’un conflit entre les grandes puissances sur le sol africain. D’autant plus que les multinationales qui viendraient au Congo sont animées par le crédo de maximisation du profit, et dans ce sens, elles exploitent et emportent leurs produits qui sont transformés dans leurs pays respectifs. Elles ne sont pas intéressées à la création d‘emplois stables ni à des pratiques d’exploitation durables. En plus, il n’est pas exclu que cet accord conduise dans le futur à la guerre entre les grandes puissances, notamment l’Union européenne et les Etats-Unis sur le sol congolais, au risque de se retrouver dans la situation qui s’est produite dans les années 1997 au Congo Brazzaville. Dans ce dernier pays, un gouvernement démocratiquement élu a été renversé parce que le président Lissouba avait signé des accords sur l’exploitation du pétrole avec les entreprises américaines au détriment des entreprises françaises installées depuis des décennies. Ces dernières n’ont pas hésité à réarmer l’ancien président Sassou-Nguesso pour renverser Pascal Lissouba. La guerre, qui éclata et qui provoqua la mort de centaines de milliers de personnes, entraîna des centaines de milliers de déplacés internes et de réfugiés, et fut qualifiée par la suite de guerre ethnique.
A ces accords cités ci-dessus s’ajoute également le mégaprojet de construction de chemin de fer reliant la République démocratique du Congo et la Zambie jusqu’au port de Lobito en Angola, initié par les Etats-Unis et soutenu par l’UE. Ce projet, qui a été inauguré en Angola par l’ancien président américain Jo Biden juste aux derniers jours de la fin de son mandat, a pour objectif de raccourcir le transport des matières premières. Un tel projet nous ramène à ceux qui furent initiés du temps de la colonisation, où les routes et les chemins de fer ont été construits non pas dans la logique de désenclavement et de développement des colonies, mais pour relier les zones ou les régions d’exploitation minières avec les océans et mers afin de faciliter le transport des matières premières vers la métropole.
Des réformes profondes doivent mettre fin à l’exploitation prédatrice pour que ces minerais ne soient plus source de malédiction, mais puissent leur apporter le bonheur et l’envie de vivre.
Les jeunes Africains qui regardent chaque jour des milliers de containers transportant ces richesses quitter le continent vers les destinations lointaines (Europe, Etats-Unis, Canada, Chine…) réclament des réformes profondes. Celles-ci doivent mettre fin à l’exploitation prédatrice pour que ces minerais ne soient plus source de malédiction, mais puissent leur apporter le bonheur et l’envie de vivre.
Il convient notamment de maximiser les bénéfices tirés des réserves stratégiques en minerais de transition au profit des pays extracteurs afin d'améliorer les conditions de vie des citoyen·ne·s et de réduire les effets négatifs de l'exploitation minière.
Responsabilisation des entreprises
Pour y parvenir, il est plus que temps d’activer et d’encourager l’application, de manières rigoureuses et audacieuses, des différentes politiques internationales qui trainent dans les tiroirs, telles que les Principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits humains, les principes de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales et les principes directeurs du groupe d’experts du Secrétaire Général de l’ONU sur les minerais essentiels à la transition énergétique.
Si l’on veut que la transition énergétique soit juste et équitable, il serait juste d’appliquer le principe du pollueur-payeur et non du pollué payant.
Il est évident de soutenir des engagements tels que l'initiative pour des multinationales responsables en Suisse. Le succès de telles initiatives dépend notamment de la sensibilisation et l’information suffisante de la population aux drames humains et aux dommages environnementaux causés par le secteur minier en Afrique. De telles actions pourront soutenir le combat que mène la société civile des pays africains qui plaident nuit et jour pour le renforcement de la responsabilité sociétale et environnementale des entreprises opérant dans le secteur.
Ces entreprises multinationales se retrouvent en position de force notamment dans la conclusion des contrats miniers qui reste souvent opaque et inconnue des communautés locales. Elles utilisent leur position pour ignorer les droits des populations et les règles élémentaires d’exploitation. Leurs activités minières sont menées dans des conditions qui ne tiennent pas compte des règles élémentaires de santé publique ni du respect des droits de la population locale. Elles sont ainsi à la base de la pollution de l’air et de la contamination toxique de l’eau entraînant le développement de pathologies souvent inconnues de la population, qui tuent et aggravent la crise de santé publique.
Les populations africaines attendent encore que les pays du Nord reconnaissent le rôle que joue l’Afrique. Ce rôle mérite le financement climatique et de compensation pour les efforts qui sont demandés à sa population dans la préservation environnementale. Si l’on veut que la transition énergétique soit juste et équitable, il serait juste d’appliquer le principe du pollueur-payeur et non du pollué payant.
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global
Le magazine d'Alliance Sud analyse et commente la politique étrangère et de développement de la Suisse. « global » paraît quatre fois par an et l'abonnement est gratuit.
Initiative pour la responsabilité environnementale
Respecter les limites planétaires — oui, faisons-le !
24.01.2025, Justice climatique
Le 9 février, la Suisse votera sur une initiative populaire visant à limiter l’empreinte écologique du pays. C'est une condition sine qua non pour réduire les inégalités mondiales et protéger ensemble notre planète. Alliance Sud dit « oui » à l'initiative pour la responsabilité environnementale.
© Alliance pour la responsabilité environnementale
La protection de la Terre est dans l'intérêt de tous les êtres humains tant qu'aucun déplacement vers une planète de remplacement n’est possible. En compagnie de David Attenborough, figure légendaire de la protection de la nature sur la BBC, le chercheur suédois Johan Rockström a expliqué voilà quelques années dans un documentaire ce que l'humanité doit faire pour protéger les bases de la vie de toutes et tous : elle doit respecter les « limites planétaires ». Cette approche montre où la surcharge de la nature devient vraiment problématique, car le risque de points de rupture augmente. Si l'écosystème bascule, la perte des bases vitales est irréversible. La forte érosion de la biodiversité et les émissions excessives de gaz à effet de serre comptent parmi les secteurs où il est le plus urgent d'agir. Dans l'accord de Paris sur le climat, par exemple, l'objectif de réchauffement maximal de la planète a été fixé à 1,5 degré pour cette raison. Au-delà, l'humanité court un risque élevé de dommages irréversibles.
L'initiative populaire est une réponse au fait que le Conseil fédéral et le Parlement refusent de discuter sérieusement de la question des ressources.
L'initiative pour la responsabilité environnementale fixe un délai de dix ans, au-delà duquel l’impact environnemental dû à la consommation en Suisse ne devra plus dépasser les limites planétaires, rapportées à la population suisse. Elle tient ainsi compte du fait qu'il y a encore beaucoup d'autres personnes sur notre planète qui veulent avoir un avenir digne d'être vécu et qui y ont droit. Avec l'Agenda 2030, la communauté des États de l'ONU s'est fixé pour objectif qu'aucun être humain ne soit contraint de vivre dans la pauvreté d'ici 2030. Les personnes en situation de précarité consomment aujourd'hui très peu de ressources, surtout dans le Sud mondial, mais en auront besoin d'un peu plus à l'avenir pour pouvoir vivre autrement que dans la pauvreté. Il est donc nécessaire que les sociétés de consommation riches réduisent davantage leur recours aux ressources que la moyenne mondiale. L'initiative populaire est une réponse au fait que le Conseil fédéral et le Parlement refusent de discuter sérieusement de la question des ressources, alors même que « continuer comme avant » fait éclater les limites planétaires.
Davantage d’informations à ce sujet :
Conseil de streaming : « Breaking Boundaries : The Science of our Planet », 2021, avec Johan Rockström et David Attenborough, disponible sur Netflix
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Fin de Credit Suisse
Une CEP seule ne suffit pas
20.12.2024, Finances et fiscalité
La commission d'enquête parlementaire (CEP) a présenté un bon rapport sur la fin de Credit Suisse. Mais on peut malheureusement douter que ce document provoque un changement de mentalité fondamental dans la politique de la place financière suisse.
Franziska Ryser (VERTS Suisse / SG), vice-présidente de la CEP, s'exprime lors de la conférence de presse sur le naufrage de Credit Suisse. La CEP a tenu des propos clairs sur les manquements du gouvernement, des autorités et de la grande banque elle-même.
© Keystone / Peter Klaunzer
Les fonds propres de CS n’étaient pas suffisants
Le rapport de la CEP sur Credit Suisse (CS) a lui aussi son importance, et nous pouvons au moins espérer que certaines et certains s'en souviendront encore au cours de l’année 2025 (le Conseil national et le Conseil des États en discuteront de toute façon lors de la session de printemps). Il faudra par exemple se poser la question de savoir dans quelle mesure le manque de fonds propres a été une des raisons de la fin de CS. La ministre des finances Karin Keller-Sutter avait toujours souligné, lors des folles funérailles de CS en mars 2023, que les fonds propres de la grande banque étaient suffisants. Ce n'est pas à cause de cela que la banque a échoué, mais par manque de liquidités, ce qui l'a empêchée de réagir à l'érosion de la confiance des clients depuis octobre 2022, aux sorties massives de capitaux qui en ont résulté et à l’effondrement total du cours des actions. Les protectrices et protecteurs politiques des grandes banques (Karin Keller-Sutter y compris) ont ainsi réduit toute la débâcle au tweet d'un journaliste australien qui écrivait à l'époque qu'une banque d'importance systémique mondiale était au bord du gouffre. La CEP confirme ce que de nombreux critiques des réglementations actuelles « too big to fail » (TBTF) pour les grandes banques disent depuis longtemps : les fonds propres trop restreints de CS ont bel et bien joué un rôle. Car plus les fonds propres sont élevés, moins les clients et les investisseurs retirent rapidement leur argent d'une banque lorsqu'elle fait les grands titres.
Après la crise financière de 2008/2009 et le sauvetage d'UBS par l'État, les exigences en matière de fonds propres des grandes banques ont été revues à la hausse (même si ces exigences n'étaient pas assez élevées et pas assez conséquentes). Jusqu'à sa fin, CS est toutefois parvenu successivement à ramener de facto son ratio de fonds propres en dessous du minimum réglementaire. Comme le montre la CEP, il a été aidé à partir de 2017 par une astuce comptable, le « filtre réglementaire », qui maintenait ce ratio « artificiellement » élevé. Celui-ci lui a été généreusement accordé par l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) en 2017, apparemment contre l'avis de la Banque nationale. La CEP écrit à ce sujet à la page 7 de son rapport : « Le filtre a permis à Credit Suisse de maintenir l’apparence d’une capitalisation suffisante. »
Une Berne fédérale à l’abri des scandales
Le peu de fonds propres de CS est à mettre en parallèle avec les nombreux scandales que la banque a provoqués dans les années 2010 et qui ont contribué à détériorer continuellement sa réputation et à saper sa crédibilité. Outre les scandales qui se sont produits principalement aux dépens des actionnaires de CS (Greensill et Archegos en 2021), la CEP mentionne également celui du Mozambique : CS a accordé au gouvernement de Maputo un crédit de plusieurs milliards qui aurait dû être investi dans l'infrastructure de pêche. Au lieu de cela, l'argent a été empoché par une élite corrompue et CS a gravement manqué à son devoir de surveillance. Le pays a donc fait faillite en 2016 et un million de personnes sont tombées dans la pauvreté absolue.
Les « Suisse Secrets » sont également mentionnés (p. 530) : dans cette fuite de données, publiée par le Guardian en février 2022, il est question de 18 '000 comptes CS appartenant entre autres à des autocrates et des criminels de guerre. Ce scandale n'a certainement pas non plus « renforcé la confiance ». CS a pu compter sur l'aide bienveillante d'avocates et d’avocats offshore suisses, qui entrent toujours en jeu lorsqu'il s'agit d'affaires louches que les banques ne peuvent pas éviter de faire passer pour des obligations de diligence. Celles-ci ne s'appliquent en effet pas aux avocates et avocats des clients qui ne font que les conseiller dans leurs stratégies de placement. Ce qui nous ramène à mercredi dernier : dans le cadre de l'examen de la « loi sur la transparence des personnes morales », le Conseil des États a veillé à ce que davantage de lumière ne soit pas faite dans cette opacité. Le même jour, le Conseil national a assoupli les sanctions contre les transactions des avocats avec les oligarques russes et leurs entreprises. On peut malheureusement douter qu'un parlement qui ne fait même pas le ménage dans les coins les plus crasseux de la place financière locale tire résolument les leçons du rapport de la CEP au printemps et réglemente la nouvelle UBS, taille XXL, de manière à réduire les multiples risques pour l'économie suisse à un niveau supportable. Et ce, qu’un bon gros rapport de la CEP ait été produit ou pas.
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Commentaire sur la COP29
Un certificat d’indigence pour la riche Suisse
29.11.2024, Justice climatique
Après la conférence sur le climat COP29 à Bakou, la société civile internationale et les pays les plus pauvres du Sud global sont déconcertés par le rejet brutal de la justice climatique par les pays du Nord global. Mais la crise climatique perdure et le débat sur les mesures à prendre en Suisse ne fait que commencer.
Des participant-e-s du Sud global ont protesté lors de la COP29 contre le financement insuffisant du climat, d'autres étaient tout simplement consternés par l'attitude d'obstruction de pays comme la Suisse. © Keystone / AP Photo / Rafiq Maqbool
Deux semaines durant, à Bakou, les pays du Sud global ont lutté pour un nouvel objectif de financement climatique qui répartirait équitablement les coûts liés à la crise climatique et assurerait un soutien financier approprié de la part du Nord global. Mais ils se sont heurtés à l'opposition des pays riches. La conférence était déjà en sursis lorsque les représentantes et représentants des pays les plus pauvres et des petits États insulaires ont exprimé leur désespoir et leur colère face au manque d’empressement du Nord global à augmenter ses contributions financières. Il faut dire que ces pays pauvres et États insulaires sont déjà confrontés à des menaces existentielles en raison de la montée du niveau de la mer et d'autres effets dévastateurs du réchauffement climatique. Quelques heures plus tard, ils ont été contraints d'accepter une proposition à peine meilleure s'ils entendaient obtenir une quelconque conclusion à la conférence sur le financement climatique.
Le constat de départ de la COP29 était tout simplement que le Sud global présentait un énorme déficit de financement non couvert qui l’empêchait de mettre en œuvre des contributions nationales adéquates pour atteindre l'objectif de 1,5 degré et des plans d'adaptation nationaux, ainsi que d’assumer les pertes et préjudices liés au climat. Des obstacles à l'accès au financement climatique déjà existant sont aussi une réalité. Alliance Sud avait réclamé un objectif de financement de 1000 milliards de dollars par an.
Le Sud global fait pression
De nombreuses études confirment que le déficit de financement ne peut être comblé par des investissements privés, en particulier pour l’adaptation, ainsi que pour l'ensemble des pays les plus pauvres et des petits États insulaires. Les investisseurs refusent en effet d’intervenir et les pays déjà fortement endettés ne peuvent pas se permettre d'investir des capitaux privés au prix demandé. C'est pourquoi les pays du Sud global et la société civile ont fait pression pour que le nouvel objectif de financement climatique comprenne bien plus de fonds publics sous forme de subventions (grants) et de crédits à taux fortement réduit.
En revanche, le positionnement des pays donateurs actuels a été perçu comme très injuste par la société civile, car ils n'ont fait aucune offre pour augmenter leurs propres contributions au financement climatique. Et ce, même si l'Accord de Paris les place clairement en position de leadership et de responsables. C'est dans cette perspective qu'il faut comprendre le fort scepticisme d'une grande partie de la société civile à l'égard d'un élargissement de la base des donateurs, car cela a surtout été vu comme une façon pour les pays industrialisés de se détourner de leurs responsabilités.
La Suisse affaiblit le multilatéralisme
Alliance Sud a soutenu la demande de la Suisse d'inclure de nouveaux pays donateurs, mais a toujours attiré l'attention sur le fait que cela devait être lié à une augmentation de ses propres contributions. Or, certaines déclarations de la Suisse dans les médias pendant et après la COP ont malheureusement confirmé ce que les pays du Sud global soupçonnaient déjà : que les pays industrialisés veulent se soustraire à leurs propres responsabilités en utilisant l'argument de la base des donateurs. Par ce comportement, notre pays affaiblit en fin de compte le multilatéralisme, dont il dépend lui-même en tant que petit État.
La Suisse doit dès à présent mettre en œuvre le nouvel objectif de financement climatique et assumer sa juste part des coûts engendrés par la crise climatique, notamment dans les pays les plus pauvres du Sud global — et ce dans son propre intérêt. Cela permettra d'éviter de nouveaux dommages, de sauver des vies humaines et d'empêcher de nouvelles causes d'exode. Et seule une augmentation massive du financement climatique permettra de réussir la transition partout sur la planète, pour laquelle la Suisse s'engage au niveau international.
D'autres articles sur la COP29 à Baku
Pour les résultat de la COP29, voir ici.
Lisez également le commentaire d'Andreas Missbach sur les refus du Conseil fédéral vis-à-vis du Sud global lors de la COP29 et apprenez-en plus sur les compensations à l'étranger de la politique climatique suisse dans l'enquête de Delia Berner. Celle-ci montre qu'il existe de gros problèmes dans le projet au Ghana.
Delia Berner a représenté Alliance Sud au sein de la délégation suisse à la COP29. Ce commentaire a été rédigé en son nom propre et non au nom de la délégation.
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Le Conseil fédéral à la COP29
La maison de la grand-mère et les salades de Rösti
29.11.2024, Justice climatique
La conférence des Nations unies sur le climat COP29 est terminée, tandis que la crise climatique détruit les bases existentielles de millions de personnes. Alors que les délégué-e-s du Sud critiquent le financement insuffisant du climat, le conseiller fédéral Albert Rösti se défausse de la responsabilité de la Suisse en invoquant des restrictions budgétaires et la mobilisation de fonds privés. C'est un affront, écrit Andreas Missbach.
Palmiers déracinés par l'ouragan « Beryl » à St. Patrick, Grenade, en juillet 2024. Des maisons et des régions entières ont été détruites dans toutes les Caraïbes. © Keystone / AP Photo / Haron Forteau
Le 17 juillet 2024, Simon Stiell se tient dans une maison endommagée sur son île natale de Carriacou et confie : « Je me trouve aujourd'hui dans le salon de mon voisin. La maison de ma grand-mère, en bas de la rue, a été complètement détruite. » C'était l'œuvre de l'ouragan Beryl, qui a balayé la Grenade et de nombreux autres pays. Il poursuit : « Il est impossible, quand on vient ici, de ne pas reconnaître l'importance du financement climatique et de la compensation financière des pertes et préjudices. Nous devons investir massivement dans la résilience, en particulier pour les personnes les plus vulnérables. »
Simon Stiell est secrétaire général de la Convention-cadre de l’ONU sur les changements climatiques et, à ce titre, responsable de la 29e session de la Conférence des Parties à cette convention, à Bakou. Le 22 novembre 2024, Albert Rösti est là, devant une caméra de télévision, et lâche : « Nous subissons des restrictions budgétaires, nous appliquons un programme d'austérité... ». Ce qui est faux à Berne est un affront à Bakou. Un affront pour les habitants de pays comme la Grenade, et un affront pour les déléguées et délégués du Sud global. Selon une étude récente de l'Institut de recherche de Potsdam sur les effets du changement climatique, ces pays auront en 2049 une performance économique de 20 à 30% inférieure à celle qu'ils auraient eue sans changement climatique, en raison des émissions déjà provoquées par les pays industrialisés.
La Suisse officielle, en revanche, subit des « restrictions budgétaires » malgré un taux d'endettement extrêmement bas. Selon le journal britannique The Guardian, elle faisait partie, avec le Japon et la Nouvelle-Zélande, des pays qui ont dit non à l'augmentation du financement climatique de 250 à 300 milliards de dollars d'ici 2035.
Des délégués du Sud global ont continué à protester après que cette décision a été « martelée ». Au sens littéral du terme, puisque c'est le petit marteau en bois du président qui décide, avec ses mots « It's so decided », quand il y a « consensus » . Chandni Raina, une déléguée indienne, a qualifié l'engagement de 300 milliards de dollars de « mise en scène » et la déclaration finale de la conférence de « guère plus qu'une illusion d'optique ». Nikura Maduekwe, du Nigeria, a renchéri : « C'est une blague. »
Ce que le conseiller fédéral Rösti a également dit devant la caméra de télévision était aussi une très mauvaise blague : « Nous pouvons réaliser cela, par exemple en faisant appel à des contributions privées. ». Même Larry Summers, ancien économiste en chef de la Banque mondiale, conseiller économique du gouvernement américain et vice-secrétaire au Trésor, l’incarnation en quelque sorte du « consensus de Washington », qualifie désormais la « mobilisation des ressources privées » de « bavardage » de gens qui, sans argent, « veulent montrer leur sens de l’Etat ou recherchent des subventions très substantielles ».
Et Simon Stiell, en qualité de premier responsable de l'ONU le 25 novembre 2024, a bien sûr dû enjoliver la décision de la COP29, non sans ajouter que l’heure n’était pas aux discours de victoire.
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global
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Commentaire
Coopération internationale : le Parlement souffle le chaud et le froid
23.09.2024, Financement du développement
Depuis la session d'été, les débats parlementaires sur la stratégie de coopération internationale (CI) et le message sur l'armée sont étroitement liés et donnent lieu à un imbroglio de chiffres. Que s'est-il passé exactement ? – Explication d'Andreas Missbach
Illustration de la répartition des places dans la salle du Conseil national. Session d'automne 2024.
© Keystone / Peter Schneider
Les dépenses par groupe de tâches comprennent les charges portées au compte de résultats qui ont une incidence sur le frein à l'endettement (dépenses courantes) et la totalité des dépenses d'investissement. Leur ventilation par groupe de tâches indique à quelles fins la Confédération utilise ses ressources financières. (Source : portail des données de la Confédération)
Situation intermédiaire au terme de la session d'automne
Le 11 septembre, lors du traitement de la stratégie CI 2025 - 2028, le Conseil des États a corrigé la décision qu'il avait prise lors du débat sur le message sur l'armée durant la session d'été. Une proposition qui aurait remis en jeu la coupe de 2 milliards a été très clairement rejetée par 31 voix contre 13. Issu du PLR, l'auteur de la proposition n'avait même pas le soutien unanime de ses propres rangs. Une coupe de 800 millions de francs a également été rejetée par 28 voix. Lors des débats, la décision antérieure a été qualifiée de précipitée. Le soupir de soulagement de la Monbijoustrasse, où se trouve le bureau d'Alliance Sud, a été clairement perceptible jusqu'au Palais fédéral !
Mais le soulagement a été de courte durée. Le 19 septembre, le Conseil national a pris la décision contraire. Il souhaite concrétiser les 4 milliards supplémentaires pour l'armée, qui ont obtenu une majorité dans les deux chambres, via des « mesures de compensation » — entendez des coupes — dans quatre domaines, dont la coopération internationale. Sans toutefois y apposer une étiquette de prix et sans dire combien chaque mesure doit rapporter. Deux jours plus tard seulement, le Conseil fédéral en a rajouté une couche. En contradiction avec sa propre stratégie CI, il souhaite ponctionner 274 millions au total dans la CI dans le cadre de l’allègement du budget de la Confédération en 2027 et 2028. La politique concrète se trouve ainsi entièrement subordonnée à la politique financière.
Aperçu du futur grand bazar
Que se passera-t-il ensuite ? Entre les sessions, plusieurs commissions se pencheront sur les dossiers en question. Il est peu probable que la proposition du Conseil national comprenant les quatre mesures de réduction pour le financement de l'armée survive jusqu'à la fin et de nouvelles propositions devraient être faites pour savoir où trouver millions et milliards. Lors de la session d'hiver, le message sur l'armée 2024 fera l'objet d'une élimination des divergences entre le Conseil national et le Conseil des États. La stratégie CI 2025-2028 passera pour la première fois au Conseil national et il y aura alors très probablement une élimination des divergences lors de la même session, l'une communiquant naturellement avec l'autre : le grand bazar ! Sans oublier la cerise budgétaire sur le gâteau !
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Global, Opinion
Le putsch au Conseil des Etats menace la sécurité humaine
21.06.2024, Financement du développement
La lecture attentive du message sur la stratégie de CI 2025 – 2028 que le Conseil fédéral a envoyé au Parlement nous a quelque peu effrayés. Mais le grand choc a eu lieu début juin, lorsque la CI a été attaquée soudainement dans le cadre du message sur l'armée au Conseil des Etats.
© Services du Parlement / Franca Pedrazzetti
Il était bien connu que le Conseil fédéral veut financer entièrement le soutien à l'Ukraine au détriment du Sud global, la cause de la petite horreur à la lecture du message de la CI, n'était donc qu'un détail significatif. Concernant la baisse du taux d'APD (nous le savions déjà, malheureusement), il est écrit dans la version allemande : « Cela s'explique par le taux de croissance du RNB [réd : le revenu national brut, c'est-à-dire l'économie] supérieur à celui des crédits alloués à la CI, en raison des mesures financières liées au frein à l'endettement. » Comment ? Se pourrait-il que le monde entier, qui en a les moyens, s'endette pour relancer l'économie en cas de crise financière ou d'épidémie, et que l'on imagine dans la Berne fédérale que la réduction de la dette publique grâce au frein à l'endettement entraînera une croissance économique ? Mais l'alerte a été levée par la suite, ce n'était qu'une erreur de traduction venant de la version française.
Le 3 juin, nous avons été très choqués en suivant les délibérations du Conseil des Etats. Tout d'abord, il a rejeté une proposition qui aurait permis d'augmenter les dépenses de l'armée jusqu'en 2030, comme le voulait absolument la majorité bourgeoise masculine (il s'agit surtout d’hommes), de manière extraordinaire et combinée avec le financement extraordinaire de l'aide à l'Ukraine. Mais aussitôt après, cette majorité a décidé de gonfler le budget de l'armée de quatre milliards pour l'achat d'armes et de rogner en contrepartie de deux milliards la coopération au développement. Une attaque frontale contre la CI ! (Malheureusement des métaphores militaires viennent constamment à l'esprit...)
Et ce, même si le Secrétariat d'Etat à la politique de sécurité nouvellement créé déclare : « Une menace militaire directe comme une attaque armée contre la Suisse est peu probable à court et moyen terme. » En revanche, les menaces, comme les cyber-attaques, se sont intensifiées. On a oublié ou jamais pris connaissance de ce que le Conseil fédéral écrit dans le rapport sur la politique de sécurité : « Elle [la politique étrangère] participe au renforcement de la sécurité et de la stabilité internationales en proposant ses bons offices, en contribuant à la promotion de la paix, en s'investissant en faveur du droit international, de l'Etat de droit et des droits de l'homme, en luttant contre les causes de l'instabilité et des conflits au moyen de la coopération au développement et en soulageant la population civile grâce à l’aide humanitaire. »
Apparemment, c’est trop demander que la notion de sécurité humaine soit entendue par la majorité du Conseil des États. Mais la bataille pour sauver la CI n'est pas encore perdue, la contre-attaque est en cours et nous ne nous rendons pas ! Veuillez excuser, une fois de plus, les métaphores militaires !
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DERRIÈRE LES GROS TITRES
Un paradis de façade
28.06.2024, Autres thèmes
Des eaux turquoise et cristallines, du sable blanc et des palmiers : Cayo Albuquerque est superbe, mais c'est aussi un point de transit pour les êtres humains et la cocaïne.
Sur deux îles minuscules près de la côte du Nicaragua se retrouvent des pêcheurs, mais aussi des garde-côtes, des soldats colombiens et des personnes en fuite vers le nord. © Karin Wenger
Le voyage de Panama aux Bahamas dure une dizaine de jours environ en voilier. Pour nous, il prend fin après 18 heures déjà. Au milieu de la nuit, par une mer agitée, nous découvrons que de l'eau de mer s'est infiltrée dans le bateau. Nous devons jeter l'ancre en urgence pour trouver la fuite et la colmater. La terre la plus proche est presque aussi éloignée que le Panama. C'est un minuscule atoll comptant deux îles : Cayo Albuquerque. À première vue, c'est un paradis. L'atoll est un territoire colombien même s’il est bien plus proche du Nicaragua que de la Colombie. Il y a ici deux îles si petites qu'on en fait le tour en dix minutes. Sur l'une d’elles vivent des soldats colombiens. Ils viennent du continent, sont jeunes, et certains voient la mer pour la première fois. Leur mission est d'empêcher le Nicaragua de s'emparer des îles et d'éviter qu'elles ne deviennent un lieu de transit pour les êtres humains et la cocaïne. Mais si les soldats ont Internet, l'électricité et la radio, ils n’ont pas de bateau. On pourrait presque dire qu’ils sont prisonniers sur leur propre îlot. Les petites embarcations des pêcheurs sont amarrées devant la seconde île. Ils viennent de l'île voisine de San Andrés, plus grande, et restent dans l'atoll jusqu'à ce qu'ils puissent repartir avec suffisamment de thon, de barracudas, de maquereaux et de homards. Sur leur îlot, il y a ni électricité ni eau, mais des bateaux avec lesquels certains ne transportent pas que du poisson.
Nous sommes épuisés et soulagés lorsque nous jetons l'ancre entre les deux îles. Nous avons réussi, nous n'avons pas coulé. Nous trouvons bientôt la fuite entre la baille à mouillage, le coffre à voiles et la cabine et la réparons. C’est à ce moment que surgit un autre problème : il y a du jeu dans le palier de ligne d’arbre. Il faut sortir le bateau de l'eau. Le moteur ne devrait plus être utilisé. Nous devons retourner à Panama à la voile, sauf qu’il n’y aura pas de vent ces trois prochaines semaines. Nous jetons donc l'ancre ici et nous nous rendons vite compte que ce coin de terre inconnu est peut-être un paradis pour nous, mais que pour d'autres, c'est un point de passage sur une route infernale.
Des femmes avec des enfants, des vieux et des jeunes. Ils n'avaient rien d'autre que les vêtements qu'ils portaient sur eux. Bien sûr, nous avons partagé.
Brinell Archbold, Pêcheur
« Ils étaient assis ici, là et encore ici, et attendaient. Des femmes avec des enfants, des vieux et des jeunes. Ils n'avaient rien d'autre que les vêtements qu'ils portaient sur eux. Ils mendiaient de l'eau et de la nourriture. Bien sûr, nous avons partagé », raconte Brinell Archbold, l'un des pêcheurs. Il montre du doigt le bosquet de palmiers où des canettes vides et d'autres déchets ont été lancés parmi les broussailles. Eux, ce sont des réfugiés en route vers le nord. Destination : les États-Unis. La plupart viennent du Venezuela. Près de huit millions de Vénézuéliens ont quitté leur pays depuis 2014 à la recherche d'une vie meilleure. Selon l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, il s'agit de l’exode le plus massif de l'histoire récente de l'Amérique du Sud et de l'une des pires crises de réfugiés au monde (voir global #88). Afin de contourner la dangereuse jungle du Darién entre la Colombie et le Panama et pour sauter le Panama et le Costa Rica, ils s'envolent du territoire colombien vers l'île de San Andrés. Là, ils sont pris en charge par des pêcheurs et emmenés à Cayo Albuquerque, puis transportés vers le nord par des Nicaraguayens. « Certains passeurs promettent aux réfugiés de les emmener au Mexique ou aux Bahamas, mais ils les transportent ensuite à Albuquerque pour économiser du carburant et les laissent échoués ici », explique Daniel Acosta, de la garde côtière, lorsque celle-ci se présente un jour à l'atoll pour fouiller notre bateau. Plus tard, les hommes visitent aussi l'île des pêcheurs, trouvent des Nicaraguayens illégaux, mais les laissent partir. Un bateau rempli de cocaïne semble les intéresser davantage qu'un bateau de réfugiés. Après quelques jours seulement, ils trouvent ce qu’ils cherchent, à quelques miles d'Albuquerque : une petite embarcation rapide transportant 3,3 tonnes de cocaïne.
Je sais ce que c’est d’être en fuite. J'ai moi-même fui les FARC et les paramilitaires
Pêcheur local à Cayo Albuquerque
« Je sais ce que c’est d’être en fuite. J'ai moi-même fui les FARC et les paramilitaires », raconte un vieux pêcheur avec lequel je passe une journée en mer à pêcher sur son bateau branlant. Le pêcheur avait lui-même fui voilà trente ans, lorsque les FARC et les paramilitaires avaient tué des dizaines d'hommes dans son village des hauts plateaux. Depuis, il travaille comme pêcheur même s’il ne sait pas nager. Selon lui, la surpêche a réduit les stocks de poissons et ses revenus. « Avant, nous pêchions autant en un jour qu'aujourd'hui en une semaine. » C'est pourquoi il a cherché un revenu supplémentaire en devenant passeur. Pour un transport de réfugiés de San Andrés à Albuquerque, il a reçu 400 dollars américains de la part de commanditaires. Plusieurs fois, tout s'est bien passé ; mais à une autre occasion, alors qu'il avait 14 Vénézuéliens à bord de sa petite embarcation, le moteur est tombé en panne et n'a pas redémarré. « Nous n'avions pas de nourriture et peu d'eau. Je leur ai dit alors que les enfants avaient la priorité, qu’ils auraient droit à un demi-verre d'eau par jour, et que les adultes pourraient boire un bouchon plein pour se mouiller la bouche. » Pendant cinq jours, ils ont dérivé ainsi. À la fin, ils ont été sauvés par le courant qui les a poussés tout droit vers la côte du Nicaragua. Là, les réfugiés ont disparu en suivant leur propre chemin. D'autres ont eu moins de chance. En octobre 2023, un bateau de réfugiés a disparu alors qu'il se rendait de San Andrés au Nicaragua. On n'a toujours aucune trace des 35 Vénézuéliens qui avaient embarqué. Après avoir été rejeté sur la plage du Nicaragua, le pêcheur a été ramené à San Andrés. Depuis lors, il ne transporte plus de réfugiés.
Karin Wenger a été correspondante de la radio SRF pour l’Asie du Sud-Est. Pendant un congé sabbatique elle rédige pour « global » des commentaires sur des conflits et des événements oubliés dans le Sud global.
Plus d’informations ici :
www.karinwenger.ch
www.sailingmabul.com
ou dans le podcast « BoatCast Mabul ».
© Karin Wenger
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Opinion
La fable du manque d’efficacité
19.06.2024, Coopération internationale
L’efficacité des projets de développement est régulièrement mise en doute. Un coup d’œil sur le nouveau rapport d’activité de la DDC, du Seco et de la division Paix et droits de l’homme dissipe rapidement les doutes: les mesures évaluées affichent un taux de réussite global de 80%. Un résultat remarquable au vu des crises qui secouent le monde et de la situation difficile dans de nombreux pays prioritaires. Patrik Berlinger et Bernd Steimann
Lors de la session d'été, la coopération internationale a été massivement attaquée, souvent à l'aide de chiffres sélectifs et d'argumentations irresponsables, par exemple par le conseiller aux Etats Werner Salzmann (UDC). © KEYSTONE / Alessandro della Valle
Article invité de Patrik Berlinger, chargé de communication politique et Bernd Steimann, coordination de la politique de développement chez Helvetas
Lorsque, le 3 juin 2024, le Conseil des Etats a décidé sur le champ d’économiser deux des onze milliards de francs de la Coopération internationale 2025-2028 (CI) pour augmenter le budget de l’armée, l’argument brandi par le camp bourgeois est que près de la moitié des projets de développement suisses seraient inefficaces. Benjamin Mühlemann, du PLR, a déclaré avec désinvolture: «Il y a certainement des projets importants en cours, mais il y en a aussi dont on peut critiquer l’efficacité».
Le dernier rapport d’activité de la Confédération sur la stratégie CI 2021-2024 contient de nombreux chiffres. Choisir uniquement celui qui permet de faire les gros titres relève de la polémique. Il est vrai que, selon le rapport, seuls 55% des projets de la DDC et du Seco ont un «impact durable». Mais ce n’est qu’une demi-vérité, voire un sixième de la vérité. En effet, conformément aux normes internationales, les évaluateurs et évaluatrices ne mesurent pas les projets de développement uniquement en fonction de leur «durabilité», mais aussi de cinq autres dimensions. Il en ressort que: premièrement, 86% des projets et programmes font une différence mesurable («impact»); deuxièmement, 85% de toutes les interventions examinées atteignent leurs objectifs («efficacité»); troisièmement, 97% des mesures sont adaptées aux besoins et aux priorités des bénéficiaires, des organisations partenaires et du pays concerné («pertinence»). Quatrièmement, les mesures fournissent des résultats de manière peu coûteuse et opportune dans 73% des cas («efficience») et, cinquièmement, les projets sont bien coordonnés avec d’autres interventions dans un pays ou un secteur dans 85% des cas («cohérence»).
Même si la qualité des évaluations peut être remise en question en raison de méthodes d’enquête hétérogènes et parfois pas totalement transparentes, les données fournissent un point de repère pour un débat documenté. Certes, la CI est déjà aujourd’hui, par rapport à d’autres domaines comme l’agriculture, l’éducation ou l’armée, le domaine le plus scruté en termes de mesures et de documentation publique. Mais il existe toujours un potentiel d’amélioration. C’est pourquoi le suivi et l’évaluation des projets doivent être développés dans trois domaines: améliorer la disponibilité des données, moderniser le traitement des données grâce à la numérisation et améliorer la consultation et la communication des résultats de développement.
Globalement, un taux de réussite tout à fait honorable de 80%
Pour toutes les dimensions, à l’exception de la «durabilité», le taux de réussite se situe donc entre 73% et 97%. Dans l’ensemble, l’analyse transversale de 80 à 100 évaluations externes annuelles de projets, programmes nationaux et portefeuilles thématiques complets indique un taux de réussite de 80% – une valeur incontestablement très acceptable compte tenu du contexte difficile dans lequel les programmes de développement, les interventions de promotion de la paix et les mesures de promotion économique sont mis en œuvre.
Il ne fait aucun doute que le faible taux de «durabilité» est insatisfaisant. Il y a toutefois plusieurs explications à cela: les interventions examinées ont eu lieu dans une phase marquée par des crises et des bouleversements politiques dans de nombreux pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger, ainsi que l’Afghanistan, le Soudan et le Myanmar. Dans le même temps, la dévastation climatique croissante, la pandémie de Covid et la guerre en Ukraine ont déclenché une polycrise: les crises qui se chevauchent ont fait augmenter le coût de la vie, les inégalités et la dette publique et ont aggravé l’insécurité alimentaire, la situation des droits humains et les mouvements migratoires involontaires dans de nombreux pays partenaires.
De nombreuses réalisations concrètes grâce à la CI
Malgré les crises secouant actuellement le monde et la situation parfois très difficile dans de nombreux pays prioritaires, la CI suisse a enregistré entre 2020-2022 d’importants succès, comme en témoigne ce rapport d'activité. En matière de «développement économique», plus de 50'000 membres du personnel des administrations financières ont été formés à travers le monde et près de 900 communes dans 19 pays partenaires ont été soutenues dans la mobilisation de recettes fiscales supplémentaires. La qualité de vie de plus de 12 millions de personnes réparties dans 237 villes s’est améliorée grâce au développement durable d’espaces urbains et d’infrastructures. Des milliers d'emplois ont pu être créés et de nombreux pays ont été soutenus dans leurs réformes juridiques et réglementaires, permettant à près de 400'000 PME d'accéder à des financements. Dans le volet «environnement», la coopération au développement a permis à plus de 16 millions de personnes de s'adapter au changement climatique – par exemple par le biais d'une agriculture agroécologique, d'une gestion adaptée des forêts et des régions de montagne ou encore d'une meilleure gestion des risques de catastrophe. En outre, près de 20 millions de personnes ont eu accès à des énergies renouvelables sous forme de chauffage urbain, de biomasse et de photovoltaïque.
Dans le domaine «développement humain», les contributions de la DDC ont permis au CICR, au HCR et au Programme alimentaire mondial de fournir une aide humanitaire à un million de personnes en Ukraine, à plus d'un million en Afghanistan et à plus d'un demi-million au Soudan. En outre, cinq millions de personnes ont été sensibilisées à la prévention de maladies non transmissibles et 1,6 million d'enfants ont eu accès à l'enseignement primaire ou secondaire. Enfin, dans le domaine «paix et gouvernance», la CI suisse a joué un rôle déterminant dans 21 processus de paix, notamment en Colombie et au Kosovo, et a négocié des accords de cessez-le-feu dans sept pays. Dans d'innombrables pays, la Suisse a mis en œuvre des mesures de lutte contre la corruption, encouragé des administrations à être transparentes et responsables et soutenu la participation politique de la société civile.
Une autre affirmation ne résiste pas à l’examen
A l’occasion de la décision du Conseil des Etats du 3 juin 2024 d’économiser deux des onze milliards de francs de la Coopération internationale 2025-2028 (CI) au profit de l’armée, Lars Guggisberg de l’UDC a affirmé: «L’aide au développement a massivement augmenté. Elle a été multipliée par trois et demi ces dernières années». Les chiffres officiels sur l’évolution de la CI montrent une autre image: l’aide publique au développement (APD) est passée d’environ 2,8 à 3,4 milliards de francs au cours des dix dernières années.
Les dépenses de développement sont même en baisse par rapport au PIB – ce que l’on appelle le taux d’APD: selon l’état actuel de la stratégie CI 2025-2028, qui devrait être adoptée par le Parlement à l’hiver 2024, le taux d’APD (sans tenir compte des dépenses d’asile en Suisse) s’élèvera à 0,36 % à l’avenir. Depuis 2014, le taux d’APD a enregistré ses valeurs les plus élevées en 2020 et 2021, avec 0,45% à chaque fois. Avec la proposition du Conseil des États de transférer 500 millions par an de la CI à l’armée, ce taux passerait même, selon toute vraisemblance, sous la barre des 0,3% – et donc sous la valeur moyenne de tous les pays donateurs de l’OCDE (0,37% en 2023). Une valeur honteusement basse pour la Suisse, pays prospère et «humanitaire». Elle perdrait complètement de vue l’objectif de l’ONU de 0,7%, qui a été confirmé par l’Agenda 2030 pour le développement durable.
Non seulement la CI n’a pas augmenté par rapport à la puissance économique suisse (PIB). L’efficacité de la CI est également bien meilleure que ce que certains politiciens aiment à répéter. Le Parlement et le Conseil fédéral devraient donc se rappeler que si l’on veut améliorer la sécurité et la stabilité dans notre pays et en Europe, la Suisse ne doit pas seulement envisager de s’armer à l’intérieur du pays, mais elle doit continuer à investir dans la coopération internationale. Concrètement, ce sont la promotion civile de la paix et le renforcement des droits humains, les programmes de développement à long terme et l’aide humanitaire, les mesures de protection du climat et d’adaptation, ainsi que le développement durable et le renforcement de l’économie locale dans les pays plus pauvres.
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