Communiqué

Un plus pour elle-même, un moins pour le monde

09.06.2022, Coopération internationale

Candidate au Conseil de sécurité de l'ONU, la Suisse se vante de sa politique des droits humains et de son rôle de pionnier en matière de développement durable planétaire. Mais dans divers domaines la Confédération doit revoir sa copie.

Un plus pour elle-même, un moins pour le monde

© Ruedi Widmer

A plus for peace — Un Plus Pour la Paix : c'est avec ce slogan que notre pays fait campagne auprès des 192 autres membres de l'ONU pour être élu aujourd'hui au Conseil de sécurité de l'ONU. Il est indéniable que la Suisse est un membre actif de l'ONU, qu’elle s'y engage pour la paix, la liberté, la démocratie et les droits de l'homme et plaide pour une ONU forte dans le concert mondial des mul-tiples organisations multilatérales. Dans sa candidature, la Suisse souligne non seulement son rôle de médiateur neutre dans la diplomatie internationale, sa tradition humanitaire et son potentiel d'innovation, mais aussi son engagement pour un développement durable de la planète et donc pour une mise en œuvre rigoureuse de l’Agenda 2030 de l’ONU et de ses 17 objectifs de développement durable.

Or, c’est précisément sur ce plan, où une politique de paix globale est aussi en jeu et où il convient donc de concilier les objectifs de la politique climatique, sociale, de genre ou environnementale avec la politique économique, que notre pays n’est pas un plus, mais un moins pour le monde. Dans le classement des pays par ordre de durabilité globale, la Suisse figure parmi ceux qui causent le plus de dommages aux autres. Dominik Gross, expert fiscal et financier chez Alliance Sud, le centre de compétence suisse pour la coopération internationale et la politique de développement, explique : « La place financière helvétique et les grandes entreprises multinationales en Suisse en sont les princi-pales responsables. En évitant de payer des impôts, en polluant l'environnement et en exploitant la main-d'œuvre, elles violent les droits humains dans les pays économiquement défavorisés et nuisent considérablement à leur développement durable. Notre monde politique en fait bien trop peu pour y remédier. »

Mettre les promesses électorales en pratique

La politique fiscale et financière de la Suisse nuit à l'application des droits humains dans les pays du Sud. En 2016 déjà, le Comité de l'ONU pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (Comité CEDEF) critiquait par exemple la Suisse parce que sa politique fiscale et financière avait des effets potentiellement négatifs sur la capacité des autres États, surtout ceux qui disposent déjà de faibles revenus, à mobiliser le maximum de ressources disponibles pour la réalisation des droits des femmes.

À l’époque, le Comité CEDEF recommandait à la Suisse d'évaluer régulièrement les effets de sa politique fiscale et financière sur la réalisation des droits des femmes dans le monde entier. Cinq longues années se sont écoulées et la Suisse est restée totalement inactive sur ce front. Et ce n'est qu'un exemple parmi d’autres de la manière dont notre pays traite les recommandations de l'ONU visant à la réalisation des droits humains dans nos frontières et à l'étranger. Andreas Missbach, directeur d'Alliance Sud : « Nous exigeons donc du Conseil fédéral qu'après les élections, il tienne les promesses faites dans le cadre de sa candidature et mène également une politique active en matière de droits humains dans les questions économiques. Le respect des recommandations du Comité CEDEF de 2016, qui n'a que trop tardé, constituerait un premier pas »