Communiqué

Colombie : rapport exige plan de fermeture pour mine de Glencore

05.12.2023, Commerce et investissements

Un nouveau rapport demande que Glencore retire la plainte contre la Colombie au sujet de la déviation de l’arroyo Bruno, qu’il présente un plan de fermeture responsable avec la participation des communautés et qu’il crée un fonds de réparation intégral de l’environnement. La pression augmente pour que l'accord de protection des investissements avec la Suisse soit également amélioré.

Isolda Agazzi
Isolda Agazzi

Experte en politique commerciale et d'investissement, responsable média pour la Suisse romande

+41 22 901 07 82 isolda.agazzi@alliancesud.ch
Colombie : rapport exige plan de fermeture pour mine de Glencore

Isolda Agazzi avec une délégation d'ONG au Parlement colombien, 30 mai 2023.

© Alliance Sud

Communiqué de presse du 5 décembre d’Alliance Sud, ASK, Public Eye, CINEP, CENSAT Agua Viva/Amigos de la Tierra Colombia, Pro Natura/Friends of the Earth Switzerland

Trois représentantes d’ONG et de communautés colombiennes étaient de passage en Suisse la semaine dernière pour dénoncer les agissements de Glencore, propriétaire exclusif de la mine de charbon de Cerrejón, la plus grande exploitation à ciel ouvert d’Amérique latine. Carolina Matiz de CINEP, Tatiana Cuenca de Censat Agua Viva et Greylis Pinto, représentante de la communauté de Chancleta, vivant à proximité de la mine, terminaient ainsi un tour de trois semaines, qui les a menées en Suisse, Belgique, Allemagne, Pays-Bas et Danemark.

Elles ont présenté aux gouvernements, aux représentants de la société civile et des institutions financières un rapport intitulé «Does Cerrejón always win?», qui détaille la façon dont cette mine opère depuis 40 ans dans la Guajira, le département le plus pauvre de Colombie. Sur ces terres semi-désertiques, où vivent le peuple Wayuu, des afro-descendants et des petits paysans, l’activité minière a asséché 17 rivières, déplacé 25 communautés et provoqué la mort de 5'000 enfants wayuus de faim et de soif ces dix dernières années.

Greylis a raconté comment sa communauté afro-colombienne a été déplacée de force il y a 11 ans sans que soient respectés les standards internationaux en la matière. Elle vivait de l'agriculture, de l'élevage et de la chasse, mais dans son nouvel emplacement elle n'a pas de terre, ni d'eau et a perdu ses traditions et coutumes. Jusqu'à aujourd'hui, ses membres ne bénéficient pas de programmes sociaux, n’ont pas de revenus stables, ni de perspectives.

Douze sentences de la cour constitutionnelle, aucune appliquée

La cour constitutionnelle de Colombie a émis douze sentences en faveur des communautés, mais aucune d'entre elles n'a été pleinement respectée et l'une d'entre elles a fait l'objet de pressions pour obtenir des millions de dollars de compensation. La dernière de ces décisions, qui remonte à 2017, demande à Glencore de suspendre la déviation de l’arroyo Bruno, un affluent du rio Rancheria (le seul de la région) jusqu’à ce que des études d’impact environnemental sérieuses aient été menées et qu’il le retourne à son cours naturel. Pour s’opposer à cette sentence, Glencore a porté plainte contre la Colombie sur la base de l’accord de protection des investissements entre cette dernière et la Suisse. C’est la troisième plainte en cours de la multinationale basée à Zoug contre Bogota et le montant de l’indemnisation demandée n’est pas connu. Il y a quelques jours, on a appris que Glencore a déposé une quatrième plainte, probablement en relation avec la mine de Prodeco.

Le rapport des organisations colombiennes demande :

-    Que Glencore retire la plainte contre la Colombie pour la déviation de l’arroyo Bruno ;
-    Qu’il présente un plan de fermeture responsable avec la participation des communautés et qu’il crée un fonds pour la réparation intégrale du territoire, qui implique la restauration de l'écosystème, l'indemnisation des dommages subis par les victimes et la reconnaissance des dommages subis par ces dernières par le biais d'actions publiques. La concession actuelle expire en 2034 et la peur est grande de voir le géant minier se retirer précipitamment, comme il l’a fait de la mine de Prodeco, dans la région voisine de Cesar, laissant à l’Etat colombien le fardeau de dépolluer les lieux, dans un milieu devenu hautement conflictuel ;
-    Que les institutions financières arrêtent de financer les mines de charbon en Colombie, ou qu’elles exercent leur influence pour que ces dernières respectent les droits humains et l’environnement.

Lors de la mission internationale en Colombie de mai 2023, à laquelle a participé Alliance Sud, le gouvernement colombien a annoncé vouloir renégocier tous ses accords d’investissement, à commencer par celui avec la Suisse. La renégociation a déjà commencé. Les organisations signataires de ce communiqué demandent d’exclure de ce nouvel accord le mécanisme de règlement des différends investisseurs – Etat (ISDS), qui permet à une entreprise étrangère de porter plainte contre l’Etat hôte s’il adopte des règles de protection de l’environnement et des droits humains.

Faute de quoi, ce sont les entreprises qui risquent de gagner toujours, quoi qu’il arrive et quel que soit leur bilan environnemental et en termes de droits humains, comme c’est le cas de Glencore.

 

Pour plus d’informations :
Isolda Agazzi, responsable de la politique d’investissement, Alliance Sud, tél. 022 901 07 82, isolda.agazzi@alliancesud.ch
Stephan Suhner, directeur de l’Association Suisse – Colombie, stephan.suhner@askonline.ch, tél. 079 409 10 12
Carolina Matiz, CINEP, mmatiz@cinep.org.co