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Qui supporte les coûts des dommages climatiques ?

22.03.2021, Justice climatique

« Traiter la crise climatique comme l'urgence qu'elle est » : c’est ce qu’a demandé John Kerry, l'envoyé spécial pour le climat de la nouvelle administration américaine, lors du Sommet pour l'adaptation aux changements climatiques de cette année.
Qui supporte les coûts des dommages climatiques ?

Le Pantanal sud-américain est l'une des plus grandes zones humides intérieures de la planète. Depuis le début 2020, le Pantanal se voit confronté aux pires incendies de son histoire.
© Lalo de Almeida/Folhapress/Panos

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Article

Peu d'investissements dans la résilience

22.03.2021, Justice climatique

Des changements profonds dans le réchauffement du climat mondial sur les systèmes écologiques et sociaux sont désormais inévitables.

Peu d'investissements dans la résilience
Ponton sur la rive asséchée du lac de la Gruyère près de Bulle, dans le canton de Fribourg. Le niveau d’eau du réservoir a été abaissé d’environ 15 à 20 mètres en avril 2020 afin de laisser suffisamment d’espace pour l’eau de fonte.
© Laurent Gillieron / Keystone

Même si la communauté mondiale parvient à réduire totalement, à zéro (net), toutes les émissions de gaz à effet de serre dans les 15 ans au plus tard , de nombreuses communautés et économies seront confrontées à des défis en partie insurmontables.

Les plus pauvres et les plus vulnérables seront les plus durement touchés, non seulement parce qu'ils tentent de faire face à des périodes de précipitations et de sécheresses changeantes, à la multiplication des phénomènes météorologiques violents et à l'élévation lente mais inexorable du niveau de la mer dans des zones déjà sensibles au climat.

Mais, même cinq ans après l'adoption de l'accord de Paris, les régions et les personnes concernées manquent toujours de ressources financières et matérielles dont elles ont un urgent besoin. Et malheureusement, même les récentes affirmations habituelles données lors du sommet néerlandais sur l'adaptation au début de l'année, selon lesquelles nous devons agir ensemble face à la crise climatique, n'ont pas été suivies d'engagements financiers substantiels pour transformer les belles paroles en actes.

Selon l’OCDE, les fonds publics mis à disposition jusqu’ici par les pays industrialisés pour l'adaptation dans les pays en développement se montent à 13 milliards de dollars en 2018. On notera que les deux tiers sont des prêts remboursables. Selon l'accord de Paris sur le climat, il en faudrait cependant quatre fois plus, soit la moitié des 100 milliards de dollars par an promis dès 2020. Par ailleurs, l’OCDE confirme ce qu’Alliance Sud critique depuis des années (cf. Etude et chiffres clés de mars 2020) : les pays les plus pauvres ont reçu une fraction de ce montant – selon les derniers chiffres de l’OCDE pour 2018, seuls 14 % sont allés aux pays les moins avancés (PMA) et 2 % aux petits États insulaires en développement (PIED).

À cette situation fait écho l’augmentation rapide des coûts liés au climat. Dans son Rapport 2020 sur l'écart entre les besoins et les perspectives en matière d'adaptation (Adaptation Gap Report), le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) estime que l'investissement annuel nécessaire à la prévention des dommages climatiques et à la résilience des pays en développement s'élève déjà à 70 milliards de dollars. D'ici 2030, les coûts annuels d'adaptation des pays du Sud atteindront 140 à 300 milliards de dollars, et jusqu'à 500 milliards de dollars en 2050.

Au lieu de « coûts », la Commission mondiale sur l’adaptation voit l'adaptation au changement climatique comme un gain à attendre par rapport aux montants investis (return on investment)  pour l’économie. Dans un rapport de septembre 2019, elle estime que le montant de 1,8 milliard de dollars nécessaire pour des infrastructures résilientes ou des mesures d'adaptation écologique, comme la revitalisation des récifs coralliens mourants ou la protection des forêts de mangroves, générerait un bénéfice net de 7,1 milliards de dollars pour les régions concernées.

Une meilleure protection des côtes surtout permet non seulement de sauver des vies et des structures, mais aussi d'améliorer la qualité de l'eau potable et de sécuriser les sources de revenus liées à la mer. Certaines mesures d'adaptation comme le reboisement présentent des avantages bien supérieurs, par exemple en favorisant la conservation des espèces, et peuvent même contribuer directement aux objectifs de réduction des émissions du pays concerné.

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Les symptômes de la maladie de notre climat

06.12.2021, Justice climatique

Malgré les mises en garde de la science et les phénomènes météorologiques extrêmes, l’opinion publique sous-estime encore l’importance de la crise climatique et son impact sur la planète et sur nous, les êtres humains.

Les symptômes de la maladie de notre climat
Bernd Nilles, président d’Alliance Sud et directeur de l’Action de Carême
© Fastenopfer

Dès 1989, une campagne d’affichage de l’Action de Carême rendait attentif aux dangers liés au changement climatique. Mais nous n’avons pris que de timides mesures 30 ans durant et les émissions de gaz à effet de serre ont continué à augmenter dans le monde. Aujourd'hui, la communauté scientifique s'accorde à penser que nous sommes déjà confrontés à une crise climatique aux conséquences dévastatrices pour toujours plus de personnes dans le monde, chez nous également. Malgré les mises en garde de la science et les phénomènes météorologiques extrêmes, l’opinion publique sous-estime encore l’importance de la crise climatique et son impact sur la planète et sur nous, les êtres humains. Des dispositions énergiques, de la part des milieux politiques surtout, se font attendre : même un sommet sur le climat comme celui de Glasgow ne peut apporter que la contribution que les 190 gouvernements nationaux, dont la Suisse, sont prêts à fournir.

Lors de la COP26, le président de la Confédération Guy Parmelin a affirmé à juste titre que trop peu de choses étaient faites. Il n’a toutefois pas dit que ce sont précisément les pays prospères comme la Suisse qui se soustraient à leurs responsabilités. Il nous incombe donc de continuer à rappeler que la crise climatique est déjà une réalité. En Afrique, en Asie et en Amérique latine, les populations luttent contre les inondations et les sécheresses dues en majeure partie à la crise climatique. Il en va de leur survie. Et la Suisse également ressent de plus en plus cette crise.

Il est donc d'autant plus crucial que les organisations non gouvernementales, les Églises et les médias se fassent les porte-voix des groupes de population les plus vulnérables du monde dans la politique suisse. Or, c'est exactement ce que divers politiciens « libéraux » semblent avoir essayé d'empêcher depuis un an avec leurs tentatives d'intimidation dans la foulée de l'initiative pour des multinationales responsables. Et comment se fait-il que dans les commissions parlementaires, certains politiciens, hommes et femmes, par ailleurs systématiquement critiques envers la bureaucratie et les réglementations, soutiennent une motion du conseilleur aux États Ruedi Noser synonyme de contraintes bureaucratiques sans pareilles ? Vouloir examiner à la loupe les activités politiques de toutes les organisations à but lucratif et menacer de révoquer le cas échéant leur exonération fiscale ne revient qu’à exacerber l’énorme déséquilibre qui existe dans notre société.
Alliance Sud continuera à faire tout son possible pour que la politique ne reste pas qu’une question d'argent et de couleur politique partisane.

La majorité populaire en faveur de l'initiative pour des multinationales responsables, voilà un an, a clairement démontré que la population souhaite une Suisse dont la politique et l'économie ne servent pas uniquement des intérêts nationaux et financiers. Souvent, ces derniers entravent aussi une politique climatique appropriée. Mon souhait pour la nouvelle année : que nous prenions au sérieux les symptômes de la maladie de notre planète, donnions la priorité aux êtres humains et à l'environnement et prenions enfin des mesures résolues.

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Opinion

Après Glasgow, la Suisse doit presser le pas !

06.12.2021, Justice climatique

La déclaration finale de la Conférence de l'ONU sur le changement climatique n'est pas le bout du chemin : la crise climatique s’accentue et le budget de la Suisse est bientôt épuisé. L'analyse de Stefan Salzmann, expert de l'Action de Carême.

Après Glasgow, la Suisse doit presser le pas !

La crise climatique menace déjà l’existence des États insulaires. C'est la raison pour laquelle le ministre des Affaires étrangères de Tuvalu a adressé un message à la COP26 dans un décor particulier : à Funafuti, les pieds dans l’Océan Pacifique.
© EyePress via AFP

Grêle et pluie en été en Suisse, chaleur au Canada, incendies en Grèce et en Russie, sécheresse en Iran : le récent rapport d’août du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat a attesté que l’alerte était au rouge. Les spécialistes du climat affirment sans ambages que l'ampleur du réchauffement climatique anthropique est sans précédent depuis plusieurs siècles, voire plusieurs millénaires. La fréquence et l'intensité des canicules et des fortes précipitations, ainsi que les sécheresses agricoles et écologiques, vont s’accroître et se conjuguer plus souvent. Les changements déjà observés à l’heure actuelle s’amplifieront pour devenir irréversibles. Chaque dixième de degré de hausse de la température moyenne mondiale fait une différence, en particulier pour les plus pauvres et les plus vulnérables de la planète.

Comparant les objectifs de l'accord de Paris aux promesses faites, le rapport d’octobre du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) constate que les objectifs présentés par les divers pays font tendre la planète vers un réchauffement de 2,7°C. Et parallèlement, écrit encore le PNUE, des ressources financières suffisantes font toujours défaut pour les mesures d'adaptation dans les pays pauvres : les besoins sont jusqu'à dix fois supérieurs aux fonds que les nations industrialisées, à l’origine de la crise, mettent à disposition.

La volonté est là, mais personne ne trace le chemin à suivre

Sous ces auspices, les organisateurs britanniques de la 26e Conférence mondiale sur le climat ont fait preuve de beaucoup de bonne volonté. Lors de la première semaine de la rencontre, de nouvelles initiatives mondiales ont été quotidiennement annoncées :  l’initiative de transition mondiale du charbon vers l'énergie propre, l’initiative visant à enrayer la déforestation mondiale ou encore celle des réseaux verts (Green Grids Initiative), pour ne citer que celles-là. L'Agence internationale de l'énergie a calculé avec une certaine euphorie que ces efforts pourraient conduire à un réchauffement planétaire de 1,8 degré seulement, dans la mesure où toutes les promesses étaient tenues. Et c'est précisément là que le bât blesse : aucune de ces initiatives n’est flanquée d'un plan de mise en œuvre. Les pays qui prennent ces engagements sont les mêmes que ceux qui n'ont pas réussi à fournir le financement climatique promis en 2009 pour 2020. Et si des pays comme le Brésil signent l'initiative sur la déforestation, cela peut être une lueur d'espoir, mais en termes de realpolitik, c'est probablement plus un arrêt de mort pour ce plan ambitieux qui, comme tous les autres plans ambitieux, laisse la mise en œuvre de ce dernier aux mesures politiques volontaires des différentes nations.

Et la Suisse ?

La Suisse est également sous pression : après que même le petit pas de la loi révisée sur le CO2 a été jugé trop grand par la majorité de la population en juin 2021, la délégation conduite par l'Office fédéral de l'environnement s'est rendue à Glasgow sans base légale concrète. Ici encore, toutes les négociations sur la poursuite du financement dans le domaine du climat sont au point mort. Pour des raisons compréhensibles à première vue : les pays émergents riches doivent également s'impliquer dans le financement du climat et il n'est pas acceptable que la Chine et Singapour se fassent passer pour des pays en développement et ne veulent rien débourser. Mais quand on est l’un des pays les plus riches du monde, produire de tels arguments ne sert à rien pour ceux dont les bases d’existence dépendent de ces décisions – comme les plus démunis et les plus vulnérables de la planète. Pour eux, les négociations bloquées, peu importe par qui, sont synonymes de détresse, de souffrances et de stratégies de survie précaires.

Pertes et préjudices

Les bases d’existence de beaucoup sont en jeu, et pour certains elles sont déjà réduites à néant. Dans le jargon technique, les « pertes et préjudices » désignent les problèmes irréversibles causés par le réchauffement de la planète : ce sont les conséquences climatiques qui dépassent la capacité d'adaptation des pays, des communautés et des écosystèmes. Une maison perdue par une famille à cause de la montée du niveau de la mer est engloutie à jamais. Ces dommages et pertes sont déjà une réalité aujourd’hui et prendront de l’ampleur avec chaque dixième de degré de hausse de la température. C'est pourquoi la société civile a fait de cette question une priorité absolue à Glasgow.

Budget climatique de la Suisse : bientôt épuisé

Notamment parce que la Suisse compte parmi les plus riches et qu’elle a historiquement émis des quantités considérables de gaz à effet de serre, il serait indiqué qu’elle aide les autres à réparer les dégâts déjà causés. En septembre, des spécialistes en éthique sociale de dix institutions ecclésiastiques ont débattu d’un budget résiduel de CO2 compatible avec la protection du climat. À l’appui de données scientifiquement prouvées, ils ont calculé la part des gigatonnes de CO2 encore disponibles au niveau mondial à laquelle la Suisse aurait droit si elle entend que son comportement soit respectueux du climat. Ils ont fait ce que les climatologues ne peuvent pas faire : ils ont pondéré et interprété les calculs des modèles sous l’angle de la morale. Le résultat est que la quantité résiduelle de CO2, compatible avec la préservation du climat, sera épuisée au printemps 2022. Une preuve de plus que la stratégie du Conseil fédéral visant à un taux net d'émissions de gaz à effet de serre nul d'ici 2050 n'a plus rien à voir avec la justice.

Et maintenant ?

C'est dans des moments comme la Conférence sur le climat à Glasgow que la Suisse officielle devrait prouver que la justice lui tient à cœur. L'une des façons les plus simples d'y parvenir est de mettre des ressources financières à la disposition d'autres pays : des fonds supplémentaires alimentant le crédit de développement pour les mesures d'atténuation et d'adaptation. Et davantage de capitaux pour dédommager les pertes et préjudices déjà encourus. Les bases de tels mandats de négociation ont été posées au niveau national lors de la phase préparatoire. Tout comme les objectifs climatiques nationaux, qui doivent être plus ambitieux, en Suisse également, si l'on entend encore atteindre les objectifs de l'Accord de Paris sur le climat. Les débats sur le contre-projet indirect à l'initiative sur les glaciers ainsi que la relance de la révision de la loi sur le CO2 sont une dernière chance, avant qu'il ne soit trop tard : un objectif de zéro net d'ici 2040 au plus tard, une trajectoire de réduction linéaire jusque-là et un abandon cohérent des agents énergétiques fossiles sont autant d’impératifs.

Opinion

Mauvaises réponses aux mauvais dangers

02.03.2022, Justice climatique

Les présidents des partis d'austérité PLR et UDC demandent deux milliards de francs supplémentaires pour l'armée. De l'argent qui serait mieux utilisé pour le financement urgent du climat.

Mauvaises réponses aux mauvais dangers

Malgré la répression et les arrestations - des manifestations pour la paix ont également eu lieu à Saint-Pétersbourg (Russie).
© Greenpeace / Dmitry Sharomov

Et soudain, le porte-monnaie se desserre : l'Allemagne veut débloquer 100 milliards d'euros de "fonds spéciaux", notamment pour l'armement, et en Suisse, les présidents des partis d'austérité PLR et UDC demandent deux milliards de francs supplémentaires pour l'armée. Les réactions violentes à l'agression brutale de l'Ukraine sont compréhensibles. C'est une catastrophe pour la population du pays, qui souhaitait la prospérité, la paix et, dans sa majorité, la démocratie. Pour l’heure, il est difficile de dire ce que signifie le retour des guerres interétatiques en Europe.

Sauf que la Russie de Poutine n'a pas attaqué l'Ukraine parce que l'Europe occidentale lui est militairement inférieure. Au contraire, les pays de l'OTAN possèdent partout une supériorité parfois massive en matière d'armes conventionnelles - à l'exception de quelques catégories d'armes. Même si l'on doute de la capacité d'intervention rapide en cas d'attaque d'un pays de l'OTAN, ce n'est certainement pas par manque d'armes. En 2020, la Russie a dépensé 61,7 milliards de dollars pour l’armement. Les quatre plus grands pays européens de l'OTAN en ont dépensé ensemble trois fois plus. Avec l'augmentation annoncée des dépenses militaires à 2% du PIB, l'Allemagne à elle seule va dépasser nettement la Russie.

Vladimir Poutine ne veut pas intégrer des pays de l'UE ou de l'OTAN, ni même restaurer l'Union soviétique ; les Etats d'Asie centrale, par exemple, lui sont indifférents tant qu'ils sont gouvernés de manière autocratique. Ce qui l'intéresse, c'est une Russie historique imaginaire qu'il veut réunifier. Bien sûr, un autocrate isolé est dangereux, mais dans ce cas, ce n'est certainement pas parce qu'il veut attaquer des adversaires qui lui sont supérieurs du point de vue des armes conventionnelles, mais parce qu'il a les doigts sur le bouton des missiles nucléaires. Aucune des menaces réelles qui pèsent sur la démocratie, les droits humains, la paix et l'intégrité de l'Europe ne peut être compensée par une augmentation des dépenses d'armement.

La neutralité climatique est aussi une politique de sécurité

Pour des raisons compréhensibles, la publication, lundi 28 février, du rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) sur "l'impact, l'adaptation et la vulnérabilité", est passée inaperçue dans l’opinion publique. Son résumé, négocié politiquement, mentionne que 3,3 à 3,6 milliards de personnes "vivent déjà dans un environnement très vulnérable au changement climatique". Et il note que "si le réchauffement climatique s'accentue, les effets des phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes, notamment les sécheresses, influenceront de plus en plus les conflits violents au sein des États en raison de leur vulnérabilité accrue". Et même en l'absence de guerres climatiques, davantage de personnes tomberont malades et mourront prématurément : "Le changement climatique et les événements extrêmes qui y sont liés entraîneront une augmentation considérable des maladies et des décès prématurés à court et à long terme".

Les coûts de l'adaptation au changement climatique sont plus importants que ne le supposait encore le dernier rapport du GIEC. Celui-ci estime qu'il faudra 127 milliards de dollars par an en 2030, et davantage par la suite. Les 100 milliards de financement climatique annuel promis par les pays industrialisés pour la prévention et l'adaptation d'ici 2025 ne suffiront certainement pas, sans compter que cette somme n'a jamais été atteinte à ce jour. Par rapport à l'empreinte climatique globale de la Suisse, celle-ci devrait contribuer à cet objectif à hauteur de 1 milliard ; actuellement, elle n'en met que la moitié sur la table et cet argent provient en grande partie du budget de l'aide au développement.

Oui, PLR et UDC, il faut ouvrir le porte-monnaie, mais pour un financement climatique qui correspond à la responsabilité de la Suisse et qui garantit sa neutralité climatique. Pour la sécurité de la Suisse, aucune dépense n'est plus nécessaire que celle qui consiste à développer immédiatement les énergies renouvelables. Les centrales à gaz pour les cas d'urgence, dont les plans ont été présentés juste quelques jours avant le déclenchement de la guerre, ressemblent depuis à une mauvaise blague.

Communiqué

COP27 : des progrès malgré tout

20.11.2022, Justice climatique

Les résultats de la conférence climatique COP27 sont contrastés. L’adoption d'un fonds pour les pertes et dommages (Loss & Damage) marque un pas historique en direction de la justice climatique. Mais il n'y a pas d'abandon des combustibles fossiles.

COP27 : des progrès malgré tout

Nakeeyat Dramani Sam, 10 ans, du Ghana, demande aux nations industrialisées, lors de la COP27, de prendre en charge les dommages climatiques dans les pays pauvres.
© KEYSTONE/AP/NARIMAN EL-MOFTY

Dans l’optique du développement, les négociations sur le financement des pertes et dommages liés au climat ont été particulièrement importantes lors de cette conférence. Cette année, la pression sur les pays industrialisés a été plus forte que jamais suite aux inondations au Pakistan et à la sécheresse qui sévit en Afrique de l'Est. Personne ne peut plus nier les dommages causés par les catastrophes climatiques, ni l’impact de l'élévation du niveau des mers. C'est pourquoi les pays riches, dont la Suisse, ont dû céder à la pression des pays particulièrement touchés, des États insulaires et de la société civile, et accepter la mise en place d'un fonds Loss & Damage. « Le fonds pour les pertes et dommages est un succès probant pour la justice climatique. Il semblait impensable voilà quelques mois encore. La bonne coopération des pays du Sud et de la société civile l’a rendu possible. Mais le travail n'est pas terminé pour autant. Il s'agit désormais d'aménager ce fonds de manière efficace afin que les personnes concernées en profitent réellement. Il est crucial que le nouveau fonds soit rapidement doté de moyens suffisants », constate David Knecht, qui a observé les négociations deux semaines durant en Égypte pour l’Action de Carême.

Les progrès n’ont en revanche pas été suffisants en ce qui concerne la réduction cruciale des émissions. L'abandon rapide du charbon, du pétrole et du gaz n'a pas été inscrit dans la déclaration finale, malgré la pression de divers pays, dont la Suisse. « L’adoption d'un programme de travail pluriannuel pour la réduction des émissions ne constitue qu’un objectif minimal de cette conférence en vue du maintien de l'objectif d’une hausse limitée à 1,5 degré. Il importe désormais de financer également davantage les réductions d'émissions dans les pays en développement, faute de quoi les objectifs ne pourront pas être atteints. Dans ce domaine, les pays industrialisés n'ont pas encore tenu leurs promesses », note David Knecht.

Que plus de 600 lobbyistes des énergies fossiles aient assisté à la conférence a contribué à édulcorer la déclaration finale. « L'ONU doit absolument édicter des directives sur la gestion des conflits d'intérêts pour les conférences sur le climat. Les maigres déclarations en faveur de l'abandon des énergies fossiles sont particulièrement choquantes si l'on considère que celles-ci sont responsables de plus de 70% des émissions et si l'on compare les milliards de bénéfices réalisés cette année par les groupes pétroliers et gaziers avec le déficit de plusieurs milliards dans le financement du climat », a fustigé David Knecht.

Déception sur le thème de l’adaptation

Ce terme désigne l’adaptation au changement climatique, comme la gestion de la sécheresse croissante dans l'agriculture. « L'adaptation au changement climatique est un thème central pour la sécurité alimentaire. Vu la situation mondiale actuelle, il est regrettable que la COP27 n'ait pas donné lieu à beaucoup de discussions et, par conséquent, à des progrès. Les financements promis jusqu'à présent sont totalement insuffisants », déclare Christina Aebischer, qui a assisté à la COP27 sur place pour Helvetas. Selon elle, la déception est grande, pour les organisations et les pays africains surtout ; ils avaient attendu davantage de ce sommet climatique en terre africaine.

Le respect de l'accord conclu lors de la COP de l'année dernière à Glasgow, visant à doubler le financement de l'adaptation d'ici 2025 par rapport à 2019, est d’autant plus improbable. « La Suisse n'a pas non plus pris d'engagements supplémentaires, ce qui est incompréhensible pour nombre de pays pauvres. Malheureusement, cette réalité est essentiellement liée à l'échec de la votation sur la nouvelle loi sur le CO2. Il est urgent que notre pays renforce le financement de la protection du climat dans sa législation, afin que les moyens nécessaires puissent être mis à disposition pour l'adaptation ».
Point positif en revanche : il a été pour la première fois convenu de lancer enfin, l'an prochain, la discussion sur la manière dont les flux financiers internationaux peuvent être réorientés vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la promotion d'un développement résilient au changement climatique. La clarification du contenu et, a fortiori, la conclusion d'un accord sont bien sûr encore lointaines, mais la discussion nécessaire et urgente est engagée.

Autres citations de nos membres et membres associés :

« La COP27 a largement négligé les thèmes de l'agriculture et de l'alimentation. Pourtant, près d'un tiers des gaz nocifs pour le climat sont imputables au système alimentaire. C'est pourquoi, avec d'autres ONG, Biovision s'est engagée à Charm el-Cheik pour que le processus Koronivia intègre obligatoirement la transformation durable de nos systèmes alimentaires et que le thème de l'agroécologie pèse davantage dans les négociations climatiques. L'agriculture mondiale souffre des conséquences du réchauffement planétaire. Toujours plus de personnes ne mangent pas à leur faim. Les habitants du Sud sont particulièrement touchés. Nous n'avons plus de temps à perdre ! »
Tanja Carrillo, responsable du projet Policy & Advocacy chez Biovision (elle était sur place)

« À Charm el-Cheikh, la Suisse a assuré qu'elle prendrait une part équitable de l'objectif de 100 milliards pour le financement climatique. Il faut s'en féliciter, car les promesses faites jusqu'ici pour soutenir le Sud global sont loin d'être tenues. Il est particulièrement choquant que la Confédération utilise pour le financement climatique des fonds inscrits au budget de la coopération au développement. »
Angela Lindt, responsable du service politique de développement chez Caritas Suisse.

« Même si les pays du Sud global sont ceux qui ont le moins contribué au changement climatique, ils sont les plus touchés par la catastrophe climatique — cela vaut aussi pour les jeunes et les générations futures. Des règles contraignantes sont donc nécessaires à l'échelle planétaire afin de mettre sans tarder les responsables de la crise face à leurs responsabilités. »
Annette Mokler, politique de développement et coordination de programmes au Pérou et au Sahara occidental chez terre des hommes suisse

Pour de plus amples informations :
Action de Carême, David Knecht, responsable des questions énergétiques et de la justice climatique, tél. +41 76 436 59 86
Alliance Sud, Andreas Missbach, directeur, tél. +41 79 847 86 48 
Helvetas, Christina Aebischer, spécialiste en climat, tél. +41 76 459 61 96
Biovision, Tanja Carrillo, responsable du projet Policy & Advocacy
Caritas Suisse, Angela Lindt, responsable du service politique de développement, tél. +41 419 23 95
Terre des hommes suisse, Annette Mokler, annette.mokler@terredeshommes.ch


Notice d’information d’Alliance Sud sur la contribution suisse au financement international dans le domaine du climat.

Pendant ce temps à Berne : une décision scandaleuse au Conseil des États

La conférence sur le climat s'est déroulée dans le contexte d’un manque de ressources financières d’au moins 17 milliards par rapport à l'objectif global de 100 milliards de dollars. La nécessité de moyens financiers accrus de la part du Nord en était le thème central. Cette situation n'a cependant pas empêché la Commission de l'environnement du Conseil des États (CEATE-E) de supprimer à nouveau une modeste hausse du « crédit-cadre pour l’environnement mondial 2023-2026 » pendant la conférence. Et ce, même si le président de la Confédération Ignazio Cassis, dans son discours d’ouverture, avait déjà annoncé ces fonds supplémentaires pour le Fonds pour l'environnement mondial (FEM ; Global Environment Facility, GEF). Le FEM sert à soutenir les pays en développement et les pays émergents dans la lutte contre la crise climatique et dans l'adaptation au changement climatique. Ces quatre dernières années, il a ainsi permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 1,440 milliard de tonnes d'équivalents CO2, soit 33 fois les émissions annuelles de CO2 de la Suisse.
 

Le Conseil dans son ensemble doit corriger le tir

La CEATE-E a donc annoncé le 11 novembre qu'une majorité de la commission proposait au Conseil des États de rogner le montant de 50 millions de francs. L'argument avancé est la « situation financière tendue » de la Suisse — une insulte aux pays du Sud, bien moins bien lotis financièrement et qui, de surcroît, ne sont pas eux-mêmes à l'origine du changement climatique. « Si la situation financière de la Suisse prospère est considérée comme tendue, comment peut-on attendre des pays les plus pauvres qu'ils surmontent la crise climatique sans aide supplémentaire ? La CEATE-E aurait dû reconnaître l'urgence de la situation et accroître plutôt la contribution », s’indigne Andreas Missbach, directeur d’Alliance Sud, le centre de compétence suisse pour la coopération internationale et la politique de développement. Alliance Sud demande au Conseil des États de rejeter la proposition de réduction de sa commission lors de la session d'hiver et de tenir les promesses faites par la Suisse lors de la conférence sur le climat.

Opinion

La solution ne pousse pas dans les rizières

06.12.2022, Justice climatique

Le cirque climatique a désormais démonté ses tentes sur le continent africain. Un fonds pour les pertes et dommages est enfin devenu réalité. Mais on ignore toujours comment il sera organisé et surtout la manière dont il sera approvisionné.

La solution ne pousse pas dans les rizières

© Dr. Stephan Barth / pixelio.de

Tout au début de la conférence COP27, le « New York Times » a fait la leçon à la Suisse dans un article critiquant ses compensations à l'étranger. Un premier projet mené dans le cadre d'un accord bilatéral sur le climat entre le Ghana et la Suisse a en effet été présenté cinq jours plus tard. Pour compenser les émissions de l'administration fédérale, les riziculteurs d'Afrique de l'Ouest ne doivent plus inonder leurs champs en permanence. Cette mesure est censée réduire les émissions de méthane. Mené par le Programme des Nations Unies pour le développement, le projet peut sembler tout à fait judicieux, mais il passe à côté des défis majeurs de la réduction des gaz à effet de serre en Afrique.

Sur le continent noir, 600 millions de personnes sont privées d'énergie électrique et les deux tiers du courant sont aujourd'hui produits à partir de combustibles fossiles. Pourtant, dans la mesure où une électrification décentralisée, fiable et sans CO2 est possible, il faudrait utiliser à cette fin l'argent du « trafic d'indulgences » lié aux certificats d'émission.

Avant la conférence sur le climat, l'Organisation des Nations Unies sur le commerce et le développement a attiré l'attention sur un défi bien plus sérieux encore : un cinquième des pays d'Afrique subsaharienne dépend des exportations de pétrole. D'autres nations pourraient aussi exploiter des gisements fossiles. La République démocratique du Congo est par exemple en train de mettre aux enchères de nouvelles concessions ; et tant que les États-Unis extraient du gaz naturel et l'Australie du charbon, le Nord n'est pas du tout légitimé à prêcher le renoncement à ce pays figurant parmi les plus pauvres. Dire non à l’extraction (Leave it in the ground) a un prix, et ce n'est pas l'Afrique qui peut le supporter.

Des sommes colossales sont en outre nécessaires pour que les exportateurs actuels puissent renoncer à leur principale source de revenus. Raison de plus pour utiliser les recettes pétrolières restantes pour cette transition. Mais jusqu'à présent, la corruption, les détournements et la mauvaise gestion ont conduit au gaspillage d'une grande partie de ces ressources. La Suisse porte une part de responsabilité ici, comme une décision de justice l'a une fois de plus montré début novembre : des employés de Glencore ont traversé toute l'Afrique en avion, des valises d'argent liquide sous les bras, pour obtenir du pétrole à petit prix. Une régulation du commerce des matières premières est nécessaire pour mettre fin à l’implication de la Suisse dans la malédiction de ces dernières. La Berne fédérale pourrait ainsi mettre à disposition de l'Afrique bien plus de ressources financières, et même énormément plus, qu'en achetant des certificats d'émissions compensées par du riz.

Article

Oui à la loi climat — Oui à la justice climatique

15.02.2023, Justice climatique

Le 18 juin, la Suisse votera sur le contre-projet à l'Initiative pour les glaciers. La loi est une étape nécessaire et urgente pour la politique climatique suisse et pour la contribution de la Suisse à la justice climatique mondiale.

Delia Berner
Delia Berner

Experte en politique climatique internationale

Oui à la loi climat — Oui à la justice climatique

Le glacier Ducan dans le canton des Grisons le 11 septembre 2022.

Les raisons pour lesquelles la Suisse devrait, dans son propre intérêt, lutter contre la crise climatique sont nombreuses : les glaciers fondent toujours plus vite et amenuisent les réserves d'eau du pays, les périodes de canicule entraînent davantage de décès et les précipitations extrêmes réduisent les récoltes, pour ne citer que quelques conséquences. Mais ce que le réchauffement climatique provoque chez nous est souvent encore plus patent dans les pays du Sud mondial. En particulier lorsque les capacités financières sont nettement moindres en raison de la crise de l’endettement et de l'évasion fiscale, de nombreuses régions ne peuvent pas s'adapter suffisamment au changement climatique et sont donc plus vulnérables à ses répercussions.

La Suisse parmi les pollueurs climatiques majeurs

Un facteur décisif contribue largement à l'injustice : contrairement à la Suisse, les pays les plus pauvres du Sud mondial n’ont pas leur part de responsabilité dans la crise climatique, et pourtant ils en souffrent plus que la moyenne. La responsabilité partagée de la Suisse est particulièrement évidente si l'on compare ses émissions de gaz à effet de serre par habitant avec celles d'autres pays. Il est à cet égard essentiel de comparer les émissions basées sur la consommation, car la Suisse est justement responsable de plus de gaz à effet de serre que ne le suggèrent habituellement les chiffres calculés sur la seule base des émissions nationales, en raison de l'importation (nette) de biens et des voyages en avion plus fréquents que la moyenne de ses citoyennes et citoyens.

Selon le Global Carbon Atlas, chaque personne résidant en Suisse était responsable en moyenne du rejet de 14 tonnes de CO2 en 2019 ; c'est seulement trois tonnes de moins qu'aux États-Unis. La Suisse se situe ainsi à la 13e place mondiale, les États-Unis se trouvant à la 10e place. Nos voisins émettent tous moins de CO2 sur la base de la consommation, l'Allemagne se classant 24e avec 10 tonnes de CO2 par personne et la France 48e avec 6,5 tonnes de CO2. Même la Chine, qui émet désormais le plus de CO2 en valeur absolue, se classe 44e avec 7 tonnes de CO2, soit à peine la moitié de la Suisse. Si on prend l'exemple du Pakistan, qui a souffert d’inondations dévastatrices l'année dernière, on arrive à 1 tonne de CO2 par habitant, et même à 0,1 tonne de CO2 par habitant en 2019 dans des pays encore plus pauvres comme la Tanzanie ou le Malawi.

Intensifier le financement climatique et repenser le comportement de consommation

La Suisse est responsable tant des gaz à effet de serre émis sur son territoire que de ceux qu'elle rejette à l’étranger pour sa consommation. Pour lutter équitablement contre la crise climatique, il n'y a pas d'autre solution que de réduire rapidement les émissions domestiques, car la Suisse dispose à cet égard des moyens juridiques, techniques et financiers nécessaires. Il est de notre responsabilité d'adapter notre propre comportement pour un avenir respectueux du climat et pour éviter de nouveaux dommages climatiques partout sur la planète. La responsabilité pour les émissions à l'étranger doit être assumée indépendamment ou de façon additionnelle. Pour cela, la  Suisse doit accroître ses contributions au financement international dans le domaine du climat et repenser son comportement de consommation.

Soumise au vote populaire le 18 juin 2023 prochain, la loi climat  trace le cadre juridique pour une réduction des gaz à effet de serre suisses jusqu'à zéro émission nette en 2050 au plus tard. Cette loi est une étape nécessaire et urgente pour la politique climatique suisse et pour la contribution de notre pays à la justice climatique mondiale. Alliance Sud milite donc pour qu’un oui soit jeté dans les urnes le 18 juin prochain.

Justice climatique

Justice climatique mondiale

La Suisse porte une part de responsabilité dans la crise climatique mondiale. Elle doit apporter sa contribution à la justice climatique globale. Car les populations des pays les plus pauvres sont celles qui souffrent le plus du changement climatique, mais qui y ont le moins contribué.

De quoi s’agit-il ?

© Ryan Brown / UN Women

Politique climatique internationale

Sundarbans National Park, West Bengal, India

Financement climatique

dsleeter_2000

Compensation à l'étranger

© Association suisse pour la protection du climat

Politique climatique suisse

De quoi s’agit-il ?

Chaleur, sécheresses, inondations et ouragans : les effets de la crise climatique menacent la vie de toujours plus de personnes dans les pays du Sud mondial. Contrairement à la Suisse, les pays les plus pauvres ne sont pas responsables de la crise climatique. Leurs populations en souffrent pourtant de manière disproportionnée. Notre pays n’a pour l’heure pas atteint ses objectifs climatiques. Ses émissions de gaz à effet de serre par habi-tant sont encore bien trop élevées. Mais sa responsabilité va au-delà du marché intérieur — les deux tiers de son empreinte sont imputables aux biens importés. La place financière et de négoce de matières premières de la Suisse joue un rôle encore plus en vue.

Alliance Sud s'engage pour que la Suisse assume sa responsabilité dans la protection globale du climat. Notre pays doit atteindre la neutralité climatique d'ici 2040 en réduisant à zéro le bilan de ses émissions intérieures et en veillant à réduire ses émissions liées à la consommation à l'étranger. En tant qu'État pollueur, la Suisse doit en outre payer sa juste part des coûts supportés par le Sud mondial pour l'atténuation des émissions, l'adaptation au changement climatique et la compensation des pertes et préjudices causés par la crise climatique.

Publikationstyp

Communiqué

Climat : Temps d'assumer les responsabilités

05.09.2019, Justice climatique

La Suisse a pris des engagements internationaux dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat ; de tels engagements existent également dans le domaine de la coopération au développement. Dans une prise de position, Alliance Sud expose les interrelations et appelle la Suisse à assumer sa responsabilité financière.

Climat : Temps d'assumer les responsabilités

Dhaka, capitale du Bangladesh, qui se situe à deux mètres au-dessus du niveau de la mer, lors de la mousson le 26 juillet 2017.
© Abir Abdullah / EPA / Keystone

Sous le titre « Justice climatique et financement international du climat dans une perspective de développement », Jürg Staudenmann, expert climat d'Alliance Sud, analyse l'objectif et l'importance du financement international du climat, que la Suisse a accepté dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat. La Suisse s'est engagée, conformément à sa responsabilité climatique et à sa puissance économique, à apporter une contribution annuelle appropriée aux 100 milliards de dollars par an que les pays industrialisés doivent mettre à disposition des pays en développement pour l'atténuation (réduction des gaz à effet de serre) et l'adaptation (protection contre les effets du changement climatique toujours plus marqué).

Dans sa prise de position, Alliance Sud montre que la juste contribution de la Suisse s'élève à 1 milliard de dollars US par an. La prise de position présente des solutions quant à la manière dont ces fonds peuvent être mobilisés selon le principe du pollueur-payeur et invite le Conseil fédéral et le Parlement à prendre d'urgence les mesures nécessaires. Dans son projet 2021-2024 sur la coopération internationale, le conseiller fédéral Ignazio Cassis, chef du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), a récemment proposé que les contributions au financement international du climat – qui, il faut le souligner, sont déjà trop basses – soient financées principalement par le budget de la coopération au développement. « Il est cynique de la part de la Suisse de vouloir vendre deux fois le même franc aux pays en développement, une première fois en tant qu'aide publique au développement et une seconde fois en tant que financement du climat », déclare Jürg Staudenmann. Même les projets de développement sensibles au climat ne sont pas des projets climatiques en soi. Et inversement, les projets d'atténuation ou d'adaptation ne réduisent pas automatiquement la pauvreté.

Alliance Sud demande donc que le financement international du climat soit fait par des ressources supplémentaires prélevées selon le principe du pollueur - payeur. Concrètement, une taxe sur les billets d'avion ou l'extension de la taxe sur le CO₂ aux carburants devrait générer des revenus qui pourraient également être utilisés pour le financement international du climat.